Mai 2011 : lancement de la proposition Legendre : motion de défiance et grève

, par Admin

Le 17 mai 2011, le Sénateur UMP Jacques Legendre publie une proposition de loi sur la réforme du Statut de l’AFP....

Le 17 mai 2011, le Sénateur UMP Jacques Legendre publie une proposition de loi sur la réforme du Statut de l’AFP. Une semaine plus tard, le personnel vote à la quasi-unanimité une motion de défiance dénonçant la méthode employée par Emmanuel Hoog et exigeant un référendum interne sur la réforme. A l’appel de deux syndicats, les services "France" de l’agence sont fortement perturbés par une grève de 24 heures. Sur cette page, vous trouverez les prises de position des syndicats et des liens vers d’autres réactions.

La motion de défiance du 26 mai a été votée à l’unanimité par une assemblée générale du personnel réunie au siège de l’AFP à Paris. Les salariés des bureaux de province qui ont pu être consultés dans les heures qui ont suivi l’AG, l’ont également approuvée à l’unanimité, moins une voix.

Le mercredi 1er juin, l’ensemble des syndicats ont été reçus par le PDG Emmanuel Hoog ; vous trouverez ci-dessous leurs communiqués ainsi que ceux du PDG

  • Dernière mise à jour de cette page : le mercredi 8 juin 2011

 
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La motion de défiance

Proposition de loi sur le statut de l’AFP : motion de défiance du personnel

"Les salariés de l’Agence France-Presse condamnent la méthode employée par le PDG Emmanuel Hoog pour tenter de faire modifier à la hussarde le statut de l’AFP sans consulter le personnel.

"La proposition de loi introduite le 17 mai par le Sénateur UMP Jacques Legendre n’a nullement été débattue en interne et il serait question de la faire adopter rapidement, à quelques mois d’une élection présidentielle et sans prendre aucune des précautions qui avaient accompagné la création de notre statut en 1957.

"Les salariés exigent que toute modification éventuelle de notre statut ait pour effet de protéger et non pas de fragiliser l’indépendance ou la pérennité de la troisième agence de presse mondiale.

"Comme cela a été le cas en 1957, nous exigeons que tout nouveau statut soit soumis à un référendum interne du personnel, qui doit l’approuver par une très forte majorité, et qu’il fasse également l’objet d’un consensus très large au parlement.

"Nous rappelons également la phrase de feu le PDG Jean Marin, qui reste toujours d’actualité : ’L’AFP ne peut fonctionner que si celui qui paye ne commande pas’."

 
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Syndicats-CGT-FO-SUD-CGC-SAJ : Compte-rendu de la rencontre avec le PDG

PARIS, 01/06/2011 Comme prévu, vos représentants syndicaux ont rencontré ce matin le PDG Emmanuel Hoog qui voulait nous exposer son point de vue sur la Proposition parlementaire de loi (PPL) sur le Statut de l’AFP.

Par la suite les syndicats CGT, FO, CGC, SUD et SAJ ont tenu une AG rue Vivienne qui a réuni une centaine de personnes et a également été suivie par téléphone en province.

Voici, de la part de ces mêmes syndicats, quelques notes sur la rencontre avec le PDG, ainsi que sur l’AG :

  • questionné sur le fait de savoir si la PPL avait été écrite directement par ses services, M. Hoog n’a pas souhaité répondre. Par contre il a affirmé, en guise de préambule, sa satisfaction de voir la proposition publiée : "Je suis content de sortir de l’état d’incertitude : les choses sont plus claires", nous a-t-il dit.
  • Sur le calendrier, M. Hoog nous a dit que la PPL n’était pas encore inscrite à l’ordre du jour de la session ordinaire, qui se termine le 1er juillet. Si le débat n’était pas programmé d’ici là, il faudra attendre l’ouverture de la prochaine séance ordinaire le 2 octobre. (Une PPL ne peut pas être abordée lors d’une séance extraordinaire du Parlement, par exemple en juillet).
  • Contrairement aux opinions exprimées par les syndicats signataires de ce texte - qui sont unanimes à demander le retrait de la PPL - M. Hoog a réaffirmé que cette dernière ne modifiait pas du tout "l’âme et la nature juridique" de l’agence.
  • Evoquant le rôle joué notamment par la presse française au sein du Conseil d’administration, M. Hoog a indiqué que selon lui la fameuse devise de Jean Marin : "L’AFP ne peut fonctionner que si celui qui paye ne commande pas" n’était plus de mise depuis longtemps. "C’est plutôt l’inverse", a-t-il prétendu.
  • Concernant la modification de la composition du CA, au sein duquel quatre administrateurs "Etat", trois administrateurs "presse", deux administrateurs "personnel" et un administrateur de l’audiovisuel seraient appelés à "coopter" les six personnalités "qualifiées," M. Hoog a prétendu que les représentants du personnel verraient leur influence doublée sous le nouveau statut ! Explication : si nos deux administrateurs voulaient bloquer la nomination de telle ou telle "personnalité" il leur suffirait de s’allier avec les trois administrateurs "presse" pour avoir un majorité (cinq sur neuf)...
  • Sur le risque de voir un amendement de dernière minute modifier radicalement le projet, M. Hoog a affirmé qu’à son avis c’était très peu probable. Mais en même temps il a voulu rassurer les syndicats en prétendant qu’on pouvait espérer convaincre les parlementaires d’introduire des amendements...
  • Tout en affirmant que les fameuses "missions d’intérêt général" seraient d’une importance primordiale pour garantir les financements de l’Etat, il nous a dit, apparemment sans voir de contradiction, qu’"on n’a pas encore commencé à travailler sur les MIG" (sic).
  • Interrogé sur le fait de savoir si le Service économique de l’agence, par exemple, serait considéré comme une "mission d’intérêt général" il a dit : la Commission n’ira pas se pencher précisemment sur ce qui est de l’intérêt général ou ne l’est pas...
  • Sur la source du fameux chiffre de 10% qu’il cite partout comme la part de la presse française dans le chiffre d’affaires de l’AFP (chiffre qui est cité dans l’Exposé des motifs de la PPL), M. Hoog nous a dit qu’il allait faire une recherche...
  • Un délégué est également intervenu pour demander que les syndicats soient à nouveau visibles sur l’intranet ASAP, sachant qu’il faut pouvoir mener le débat interne dans des conditions de loyauté et de transparence. Il a également demandé qu’un espace spécial - avec forum et autres outils d’interactivité - soit ouvert et rendu bien visible sur ASAP afin de débattre de la proposition de loi. M. Hoog a dit qu’il allait étudier cela.

    Lors de l’assemblée générale, les syndicats qui ont appelé au rassemblement ont raconté la réunion et exposé leurs vues sur la PPL, dont ils ont unanimement demandé le retrait, arguant, notamment, qu’elle ne faisait l’objet, ni d’un consensus interne, ni externe.

    Nous avons également souligné l’utilité, pour le monde extérieur, de relancer la pétition "SOS-AFP" et de fournir des liens vers son site chaque fois que possible en intervenant sur Internet.

    Lors d’une intervention, Samir Douaihy de l’ADIAFP a expliqué qu’il était également essentiel de demander le rejet de la PPL, plutôt que de chercher à l’amender.

    Il a rappelé deux citations de deux anciens PDG de l’Agence :

    • Jean Marin : "Le Statut de 1957 de l’Agence France-Presse constitue une importante contribution de la France à la liberté de l’information."
    • Claude Moisy : "Pour avoir "vécu" quotidiennement l’AFP pendant trente-cinq ans, je suis persuadé qu’elle ne peut continuer à exister qu’avec le statut bâtard et aberrant qui lui a été donné lorsque le Parlement l’a dénationalisée en janvier 1957."

    Par ailleurs, nous avons appris que même Jacques Legendre, le sénateur qui présente le projet aurait des "réserves". Il serait en fait en "service commandé" et il en est "l’auteur" unique, ce qui est peu habituel au Sénat.

    Pour terminer, l’ensemble des syndicats ont rappelé qu’en plus de la question du statut il y a de nombreux conflits sociaux en cours à l’agence, dont le problème des précaires qui fera l’objet d’une nouvelle séance de négociation avec la direction lundi prochain.

    Suite au succès de la grève des 26 et 27 mai, la lutte contre la proposition Legendre et pour mettre fin à la casse sociale à l’AFP doit se poursuivre !

    Nous nous retrouverons dès la semaine prochaine en intersyndicale - nous espérons cette fois-ci avec l’ensemble des syndicats - pour proposer de nouveaux rendez-vous au personnel.

    Syndicats CGT, FO, CGC, SUD et SAJ-UNSA de l’AFP, le mercredi 1er juin 2011

     
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    Communiqué-syndicats-SNJ-CFDT : Réforme du statut : les syndicats reçus par le PDG, beaucoup de points restent flous

    PARIS, 1 juin 2011 - L’ensemble des syndicats ont été reçus mercredi matin par le PDG sur la réforme du statut contenue dans la proposition de loi déposée par le sénateur UMP Jacques Legendre. Voici un bref compte-rendu de cette réunion.

    Emmanuel Hoog estime que ce texte répond "à deux faiblesses du statut : la nature des aides publiques et la composition du CA".

    1. Nature des aides publiques : "nous sommes dans une situation d’impasse juridique et financière. Il faut assurer la pérennité d’un financement public qui est attaqué à Bruxelles. D’autres médias reçoivent des aides de l’Etat mais ce sont des agences nationales qui ne se développent pas en Europe. Les missions d’intérêt général (MIG) sont contenues dans l’article 2 modifié. On n’a pas commencé à travailler sur la quantification délicate de ces MIG qui doivent être les plus souples possibles. Il n’est pas question de rentrer dans le détail et de dire si le bureau de Djakarta fait partie des MIG".
    2. Composition du CA : Le texte réduit le poids de la presse et fait entrer dans le CA six personnalités cooptées par le reste du CA. Face aux critiques sur l’absence de critères sur ces personnalités, le PDG répond simplement qu’on "ne peut pas être trop précis dans une loi". Il imagine "des personnalités forte et indépendantes" (prix nobel, autorités morales, etc...) sans préciser en quoi elles seraient utiles au développement de l’AFP.
    3. Autres aspects
      • B to C : le texte "ne nous interdit rien" mais en meme temps le PDG admet qu’on n’a pas la même "souplesse" sur le français que sur les autres langues. "Sur la France il faut qu’on arrive à construire un partenariat avec la presse. Le patron d’AP a passé deux ans à négocier avec les journaux américains pour faire son site internet".
      • l’intégration du COM dans la loi ? le PDG n’a pas apporté de réponse sur cet aspect qui risque pourtant de faire assimiler l’AFP à un media d’Etat.
      • sur le risque d’ouvrir une boite de Pandore au cours du processus législatif ? Le risque est "excessivement minime" car le "texte est porté par quelqu’un de la majorité" et que "les parlementaires aiment l’AFP"...
      • sur le calendrier : le texte n’est pas encore inscrit à l’ordre du jour de la session ordinaire du Sénat, qui se termine fin juin. Si le texte ne pouvait pas passer d’ici là, ce serait alors à l’ouverture de la prochaine séance ordinaire en octobre

    Le PDG, fréquemment interrompu par une OS, a quitté la salle de réunion sans répondre à toutes nos questions. Le SNJ et la CFDT, prêts à examiner une éventuelle réforme de la gouvernance de l’AFP, jugent donc que beaucoup de points restent encore trop flous et sans réponse. Ils vont chercher à rencontrer les parlementaires mais jugent tout à fait prématuré que le Sénat veuille se prononcer déjà fin juin.

    SNJ - CFDT

     
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    Statut de l’AFP : vote d’une grève de 24 h et d’une motion de défiance

    Communiqué des syndicats CGT et SUD toutes catégories de l’AFP.

    Les salariés parisiens de l’AFP, réunis en Assemblée générale jeudi à Paris ont voté une grève de 24 heures sur les fils "France" de l’agence et ont également adopté, à l’unanimité, une motion de défiance à l’égard de la direction.

    Ces deux initiatives font suite à la proposition de loi lancée le 17 mai par le Sénateur UMP Jacques Legendre, avec le soutien du PDG Emmanuel Hoog, pour modifier le statut de l’AFP.

    L’appel à la grève, lancé par les syndicats CGT et SUD pour dénoncer la proposition Legendre et également soutenu par FO toutes catégories, a été adopté à l’unanimité des salariés parisiens présents, moins 10 abstentions, ainsi que par une nette majorité des salariés des bureaux de province, consultés suite à l’AG.

    Au total, 29 salariés des bureaux ont voté pour la grève, 17 se sont abstenus et neuf ont voté contre.

    Lors de cette même Assemblée, les salariés parisiens ont également voté à l’unanimité une motion de défiance lancée par l’ensemble des syndicats AFP.

    Cette motion a également été adoptée par l’énorme majorité des salariés des bureaux de province qui ont pu se prononcer : 55 ont voté pour, 10 se sont abstenus et un a voté contre.

    La motion de défiance "condamne la méthode employée par le PDG Emmanuel Hoog pour tenter de faire modifier à la hussarde le statut de l’AFP sans consulter le personnel".

    Cette proposition, "n’a nullement été débattue en interne, et il serait question de la faire adopter rapidement, à quelques mois d’une élection présidentielle", souligne le texte.

    La motion demande que toute éventuelle modification du statut "ait pour effet de protéger et non de fragiliser l’indépendance ou la pérennité" de l’AFP.

    La motion de défiance exige également que tout nouveau statut fasse l’objet d’un "référendum interne du personnel, qui doit l’approuver par une très forte majorité," et "d’un consensus très large au Parlement". Le statut de 1957 avait été voté à l’unanimité.

    Une proposition de loi (PPL) visant à réformer la "gouvernance" de l’Agence France-Presse a été déposée le 17 mai par M. Jacques Legendre (UMP-Nord), et devrait être examinée avant la fin de la session parlementaire ordinaire prévue fin juin.

    Dans le texte de loi, pour lequel un rapporteur a été désigné, il est prévu principalement une modification de la composition du Conseil d’administration de l’Agence, qui voit la représentation de la presse écrite française passer de six à trois, et la venue de six personnalités "cooptées". Le texte prévoit aussi la suppression de la Commission financière de l’AFP, l’introduction de "Contrats d’objectifs et de moyens" (COM) dans le statut et une redéfinition des "missions d’intérêt général".

    Voici le texte de la motion votée à l’unanimité par l’AG :

    Syndicats CGT et SUD de l’AFP, le jeudi 26 mai 2011

     
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    CGT : "REFORME" DU STATUT : LE TEMPS DES COPAINS

    Quelques mois après s’être fendu d’une lettre de chantage à la démission, le PDG gratifie le personnel d’un courrier de 6 pages où la mauvaise foi, les approximations et le flou côtoient les appels au dialogue, évoquant même - c’est dire s’il sent qu’un vent mauvais est en train de se lever - l’hypothèse de "propositions nouvelles qui puissent être transmises au législateur".

    L’hypocrisie est la ligne directrice de ce texte. Emmanuel Hoog fait mine d’avoir "appris le dépôt" de la proposition de loi (PPL) du sénateur UMP Jacques Legendre, alors qu’il a tout manigancé ! Dès le dépôt de cette PPL, le Pdg claironnait son appui à cette "réforme" par un communiqué au personnel.

    Il nous dit aujourd’hui qu’ "un rapporteur, M. Jean-Pierre Leleux, a été désigné pour instruire cette proposition de loi". Pour ceux qui ne le savent pas, M. Leleux est également depuis octobre 2009 membre, désigné par le Sénat, du CA de l’INA, alors présidé par M. Hoog ! On n’est jamais si bien servi que par ses amis. Mais de qui se moque-t-on ?

    La PPL Legendre c’est un texte 100% Hoog. Hoog, c’est Néron devant le Sénat mais avec le nez de Pinocchio.

    C’est un vote à la hussarde qu’on nous promet, avec un calendrier délirant puisque le Sénat pourrait voter cette PPL d’ici la fin du mois. Une parodie de débat ! Cette PPL est uniquement gérée par l’UMP, rapporteur y compris.

    Lors de la présidence Louette, le temps donné au débat devant les commissions ad hoc au Parlement et la table ronde au Sénat ont démontré qu’il fallait donner "du temps au temps". Que l’AFP était un outil de la démocratie, du pluralisme de la presse, du rayonnement de la francophonie et du droit des citoyens à une information complète et sourcée.

    Hoog affirme que le débat est sur la table depuis "bien longtemps" (sic). Il prend comme exemple le projet de son prédécesseur (re-sic) et le rapport Pigeat, composé là aussi de personnalités dites "indépendantes".

    Michèle Tabarot, présidente UMP de la commission des Affaires culturelles à l’Assemblée avait indiqué que la modification du Statut "ne viendrait pas sur la sellette avant la présidentielle de 2012". Un sénateur socialiste affirme : "Je suis furieux. Il n’y a eu aucune discussion en interne et hop dans la précipitation Jacques Legendre dépose le texte" et ajoute, "C’est Matignon qui en a donné l’ordre à Legendre". Objectif : passer en force avant la présidentielle de 2012.

    HOOG LE CABRI : L’EUROPE ! L’EUROPE ! L’EUROPE !

    Pour Emmanuel Hoog le seul coupable c’est l’Europe, mère de tous nos maux ("on peut le regretter mais c’est ainsi"). Couplet bien connu, c’est pas moi, c’est l’autre. Selon lui, la plainte d’une agence allemande serait le prétexte à l’urgence de la PPL. Pourtant son prédécesseur déclarait dans une dépêche AFP le 24 février 2010 que cette plainte était "sans fondement", "l’AFP ne reçoit aucune aide qui viole le droit européen ou le droit national". L’un dément ce que l’autre a affirmé. La CGT le redit : il suffirait d’une lettre du gouvernement français adressée à Bruxelles définissant les missions d’intérêt général (MIG) pour que ce débat soit clos.

    De plus, contrairement à ce qu’affirme le PDG, citant un de ses prédécesseurs ayant officié avant 1957, le vote des abonnements de l’Etat n’est pas un "camouflage" mais bien le paiement de services ainsi que le prévoit le statut. En revanche la transformation de ces abonnements (110ME) en MIG, dans un flou juridique total - rappelons qu’il n’y a toujours pas de directive européenne sur les services d’intérêt général, pour ne pas "fausser la concurrence" - n’est que mystification. Sans le vote des abonnements, l’AFP n’est pas "sécurisée" comme le prétend Hoog, mais PRECARISEE.

    QUELLE CONFIANCE APPORTER A LA MAJORITE POLITIQUE ?

    "Le risque (de la boîte de Pandore) doit être évacué et me paraît relever largement du fantasme". C’est ainsi que répond le PDG à une interrogation du personnel inquiet de l’examen du texte concernant l’AFP devant le Parlement. Emmanuel Hoog, ancien conseiller chargé des médias auprès d’un ex-président de l’Assemblée nationale, est soit naïf, soit optimiste. Plus probablement, il tente de nous leurrer. Il omet l’hypothèse d’amendements en provenance de députés franc-tireurs, au sein d’une majorité où même l’Elysée a bien du mal à faire régner l’ordre. Et puis, le président Sarkozy, bien conseillé, n’avait-il pas affirmé, "en temps voulu, je m’occuperai de l’AFP".

    Depuis la loi sur l’audiovisuel c’est l’Elysée qui nomme les PDG de France télévisions et de Radio-France, ces représentants qui rentreraient dans le futur conseil d’administration voulu par Hoog/Legendre et avec lesquels les deux représentants des salariés devraient s’allier pour coopter les personnalités dites "indépendantes". M. Hoog traduit cela par "renforcement de manière significative de la responsabilité des élus du personnel".

    L’AFP créée sur les fonts baptismaux du Parlement ne doit pas échapper à l’ensemble des élus de la nation pour transformer cet outil en une machine à propagande d’un parti au service des ambitions d’un homme et de ses proches amis industriels.

    COMMISSION FINANCIERE ET B2C, LES FAUX ARGUMENTS

    Il s’agit d’un renforcement du contrôle du CA et de l’Etat sur la gestion de l’Agence, la volonté de la faire plier devant le règne des marchés -tout est marchandise, même l’information- et de faire rentrer l’agence dans le rang du droit commun. Adieu au statut spécial, demain l’AFP pourrait être mise en faillite (aujourd’hui, il faudrait une loi pour décider de sa disparition). C’est bien cela qui est en cause.

    Porté par l’ivresse de la rédaction de son argumentaire, défendant corps et âme ce projet de loi, le PDG nous livre un paragraphe confus concernant le B2C. Ses arguments sont si brumeux que nous sommes en droit de lui recommander plus d’intelligibilité et de lucidité. A ce sujet, la CGT s’est déjà exprimée dans ses précédents communiqués du 27 mai "Quand la majorité devient ’une partie’, la minorité minore" et du 30 "Statut : le combat pour l’indépendance ne fait que (re) commencer". Nous recommandons aussi l’excellent argumentaire d’un de nos collègues journaliste mis en ligne sur le site http://www.sos-afp.org/fr/argumentaire_douaihy.

    Fin du fin, en conclusion de sa lettre, Emmanuel Hoog qui n’est pas à un petit mépris flatteur prêt, cherche à nous faire rentrer dans son jeu en annonçant ouvrir une adresse électronique afin de "poursuivre le débat" alors que tout a déjà été réglé comme sur du papier à musique ! Dans sa grande générosité, il promet une réponse à chacun. On voit bien là la tactique : tenter de diviser les salariés entre eux.

    La CGT appelle le personnel à ne pas tomber dans le panneau et de rester mobilisé. Notre action dans les prochains jours sera décisive.

    CGT toutes catégories - Paris, le 6 juin 2011.

     
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    STATUT : LE COMBAT POUR L’INDEPENDANCE NE FAIT QUE (RE)COMMENCER

    Le succès de la grève de 24 heures, jeudi et vendredi derniers, contre la proposition de loi (PPL) du sénateur UMP Jacques Legendre, prétendument "relative à la gouvernance de l’Agence France Presse", a déjà engrangé un premier résultat, ô certes encore bien modeste : le Pdg Emmanuel Hoog a soudain convié les syndicats à le rencontrer mercredi prochain.

    POUR LA CGT, UN SEUL MOT D’ORDRE, LE RETRAIT DE LA PROPOSITION DE LOI !

    M. Hoog va sans doute tenter de calmer le jeu, de diviser les syndicats et se dire ouvert au dialogue pour expliquer que ce n’est qu’une proposition, qu’elle peut évidemment être modifiée, améliorée, etc. Nous lui demanderons des comptes.

    D’autant que la majorité au pouvoir, après avoir concocté ce texte en cachette, entend nous imposer un nouveau statut cet été, histoire d’être tranquille à quelques semaines des sénatoriales et à un an de l’élection présidentielle.

    Ce texte est inamendable car la quasi-totalité de ses 16 articles fait peser de très graves menaces sur l’indépendance, la pérennité et le développement de l’AFP. Pour faire court :

    • Une mise sous tutelle de l’Etat. Tutelle financière, tutelle de gestion et fort risque de mainmise sur le Conseil d’administration au vu du dispositif prévu de nomination de personnalités "indépendantes" (sic) ;
    • Des financements précarisés : l’AFP n’exercerait plus en elle-même une mission d’intérêt général, elle exercerait des activités purement commerciales complétées par "des missions d’intérêt général" qui seules seraient compensées (pas forcément en totalité, en plus !) par des fonds publics ;
    • Une réduction de son périmètre d’activité, avec interdiction, carrément, d’être présente en tant que telle sur l’internet (alors que nous y sommes déjà !). C’est la condamnation du développement de l’AFP, pour ne pas gêner les puissants intérêts économiques des industriels patrons de presse.

    LA PPL LEGENDRE, C’EST LA DEPENDANCE DE L’AFP INSTITUTIONNALISEE ET SON ASPHYXIE FINANCIERE PROGRAMMEE, LA MORT A PETIT FEU.

    Hoog disait vouloir modifier la gouvernance pour se donner les coudées plus franches dans l’information numérique. Aujourd’hui, par un nouveau retournement de veste, il salue la PPL Legendre !

    6e et 7e ETAGE : LA COUPE EST PLEINE !

    C’est lui qui se tait au Comité d’entreprise alors qu’il sait pertinemment que se prépare en coulisses une réforme du statut.

    C’est lui qui est condamné en justice, cet hiver, pour non-respect des prérogatives du CE.

    C’est lui qui, dans une lettre délirante et dans un langage débridé, a sommé le personnel de se coucher devant LA SCISSION DE LA REDACTION -qu’une large majorité du personnel refusait- menaçant de démissionner six petits mois après son arrivée à la tête de l’AFP.

    C’est lui qui dépense sans compter : 6,5 millions d’euros officiellement pour en mettre plein la vue avec le réaménagement du siège. Des chiffres bien plus élevés circulent avec insistance, on parle de onze millions sans compter les imprévus qui risquent de faire monter la facture finale encore plus haut. C’est la folie des grandeurs : un studio radio-télé et les bureaux de Monsieur au 7e étage.

    Dernier épisode : le Pdg a commandé au cabinet Euro-RSCG la réalisation d’un nouveau logo, le bleu du logo actuel n’ayant pas l’heur de plaire au prince. Une initiative qui implique de changer toute la charte graphique de l’AFP. Là encore, qui va payer ?

    Sans compter la honte de l’audit "social" qui nous a couté plusieurs milliers d’euros mais ne nous a rien appris si ce n’est de sommer la direction de faire preuve de plus d’autoritarisme et de remettre en cause les prérogatives des organisations syndicales et les attributions des instances représentatives.

    ON NE PEUT PLUS FAIRE CONFIANCE A CE PDG QUI TRAHIT

    Il recrute à tour de bras au 6e étage, où directeurs et chargés de mission se multiplient comme les petits pains. Mais le "petit personnel", lui, attend toujours l’accord sur les précaires et le respect des accords SPQN. Mais pour nos salaires c’est toujours ceinture !

    Côté rédactionnel, ça déconne à tout va. Le pompon aura été décroché vendredi avec cet encadré à pleurer, intitulé : Carla Bruni-Sarkozy au G8 : une image de "conte de fée", selon les experts. Voilà en tout cas de quoi donner de solides arguments aux bons esprits qui contestent la mission d’intérêt général de l’AFP. On comprend pourquoi le PDG garde le même directeur de l’info et la même rédaction en chef !.

    Devant tant d’égarements, il est temps de réagir.

    Quant à la réforme du statut, les syndicats vont tirer la sonnette d’alarme auprès des pouvoirs publics, notamment des parlementaires, pour les convaincre que la PPL Legendre est intrinsèquement et profondément nocive..

    LA CGT, pour ce qui la concerne, METTRA TOUT EN OEUVRE POUR ENTERRER CETTE "REFORME", elle informera et mobilisera le personnel autant que nécessaire, par tous les moyens d’action légaux.

    CGT toutes catégories -PARIS, le 30 mai 2011

     
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    Quand la majorité devient "une partie", la minorité minore

    Communiqué CGT toutes catégories de l’AFP

    Après les grèves qui ne se voient pas puisqu’on n’en parle pas (rappelons ici la phrase devenue culte du directeur de l’Information, Philippe Massonnet, qui avait affirmé lors de la DPJ de février à propos de la grève de 4 heures pour soutenir les précaires votée à l’unanimité, "une grève de quatre heures ne justifie pas une dépêche"), voici maintenant les grèves votées par "une partie" des salariés. Le texte nous aura au moins épargné la formule rebattue et incantatoire "prise en otage" !

    La direction n’avait pas non plus jugé nécessaire de faire une dépêche lorsqu’elle avait été condamnée par un tribunal new-yorkais pour le vol de 13 photos sur Twitter, pourtant une première depuis l’apparition des réseaux sociaux.

    Pour la rédaction en chef, l’information devient sélective et non exhaustive. La dépêche relatant l’AG, le vote de la motion de défiance et le mouvement de grève de 24 heures à l’Agence est titrée : "AFP/Réforme de la gouvernance : motion de défiance d’une partie du personnel" mettant ainsi l’accent principalement sur la seule "réforme de la gouvernance" et sans précision sur l’unanimité de l’assemblée générale, ni sur la majorité écrasante dans les bureaux, exprimées par le personnel, toutes catégories confondues, contre cette réforme et pour la grève.

    Le texte affirme que la CGT, qui a appellé à la grève avec SUD, est minoritaire dans la rédaction et que deux autres syndicats n’ayant pas appelé à la grève représentent plus de la moitié des journalistes, en omettant délibérément que la CGT est le premier syndicat de l’AFP toutes catégories et que ce mouvement concerne l’ensemble des salariés.

    Plus grave, le commentaire dans l’avant-dernier paragraphe démontre un parti pris évident en occultant le reste non négligeable de la proposition de loi : "Le texte qui amende légèrement la loi de 1957 portant création de l’AFP prévoit principalement une modification de la composition du conseil d’administration de l’Agence et la mise en conformité de sa mission d’intérêt général avec les règles européennes en vigueur".

    On dirait que les différentes interventions des représentants du personnel -tous syndicats confondus- n’ont pas été écoutées lors l’assemblée générale d’hier, tout comme n’ont pas été lus non plus la proposition de loi ni l’ensemble des communiqués syndicaux. Une chose est sûre, le PDG et la direction de l’Information ont fait passer leur message. La dépêche ne reprend qu’un seul point de vue.

    A aucun moment ne sont exposés les motifs, détaillés par tous les intervenants lors de l’assemblée générale, et les transformations profondes sur le Statut contenus dans cette proposition de loi qui ont conduit au vote massif d’hier :

    • mission d’intérêt général indéfinie, renforcement de la mainmise de l’Etat dans le conseil d’administration et dans les modalités de financement tout en inscrivant dans la loi son désengagement financier
    • suppression de la commission financière et obligation annuelle pour le PDG de rendre compte à l’Etat
    • obligation d’un contrat d’objectifs et de moyens pluriannuel
    • contrôle de la Cour des comptes sur l’Agence
    • financement public plafonné
    • et, cerise sur le gâteau, réduction des administrateurs de la presse avec impératif, selon le projet, de "garanties sur le périmètre des missions de l’agence afin de maintenir l’équilibre entre les rôles respectifs de l’AFP, dont la mission première consiste à fournir des informations brutes à ses clients, et les médias diffuseurs et producteurs d’information auprès du public", ce qui reviendrait à inscrire dans le marbre ce dont rêvaient les patrons de presse depuis des années : l’interdiction de diffuser des informations à destination du grand public, tout en bridant le développement de l’AFP.

    La dépêche diffusée hier accrédite de façon tendancieuse la thèse de la direction -et des lobbyistes qui l’entourent- selon laquelle "la réforme de la gouvernance" serait seule en jeu dans cette proposition de loi, tout en faisant oublier l’essentiel : l’assèchement des ressources de l’AFP, sa transformation vers une étatisation/privatisation (mission d’intérêt général d’un côté, activités commerciales de l’autre) et la mort au bout.

    Elle prouve une fois de plus les dérives rédactionnelles et les pressions mises en oeuvre sur la rédaction par l’actuelle direction de l’Information, aggravées depuis l’arrivée d’Emmanuel Hoog à la tête de l’Agence.

    L’unanimité autour de la motion de défiance démontre que le personnel n’est pas dupe et refuse d’être mis devant le fait accompli par les méthodes de gestion "à la hussarde" et autoritaires de la direction.

    NDR : On attend maintenant la dépêche annonçant l’élection du nouveau président de la République le soir du second tour :

    "XX élu(e) par une partie des Français"

    "Son programme prévoit principalement une légère modification et un aménagement des panneaux annonçant les radars sur les routes et autoroutes et leur mise en conformité avec le Code de la route en vigueur"

    CGT AFP toutes catégories, Paris le 27 mai 2011

     
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    Statut AFP : pas de rejet mais des aspects inquiétants ou inacceptables pour le SNJ-AFP

    La proposition de loi déposée par la Commission de l’Education, de la Culture et de la communication du Sénat sur des modifications du statut de l’AFP envisage certains "dépoussiérages" rendus nécessaires par le temps et l’évolution des choses. Elle a aussi tenu compte de certaines propositions des syndicats de l’agence faites au cours des consultations qui ont lieu ces deux dernières années. C’est le cas du renoncement clairement affirmé à transformer l’agence en société par actions. Mais il n’y a malheureusement pas eu de consultations depuis sur un texte présenté rapidement à la veille d’élections sénatoriales et présidentielles, ce qui évidemment suscite des interrogations et des soupçons politiques. C’est tout à fait contraire à ce qui doit être fait pour changer le statut de l’AFP : un consensus le plus large possible est indispensable. Ce fut le cas en 1957. le consensus a été réalisé même au sein de l’Agence puisque un referendum du personnel avait eu lieu. On peut espérer qu’il en sera de même cette fois.

    Il y a des propositions dans ce projet de loi, dont le rapporteur n’est malheureusement pas d’un autre parti que l’auteur comme cela aurait dû être le cas, qui trahissent des méconnaissances et qui les rendent inadaptées aux réalités de l’agence ou de son environnement.

    C’est le cas de l’introduction dans les statuts de la notion de COM (Contrat d’objectifs et de moyens). Même si elle prend en compte une réalité française depuis maintenant une décennie, cette "statuarisation" nous rend assimilables à France-Télévision ou d’autres médias d’Etat. Il serait préférable de ne mentionner ces COM que dans le cadre d’un des financements possibles des Missions d’Intérêt Général (MIGs). La volonté de limiter le montant de ces dernières est dangereuse aussi. Elle obéit bien sûr aux obligations dogmatiques qui guident la Commission européenne aujourd’hui en matière de libéralisme économique. Mais les difficultés budgétaires actuelles de la France vont forcément pousser à les sous-estimer et c’est une dangereuse hypothèque pour l’avenir. D’autant que la faiblesse de ce projet de loi, comme d’ailleurs celui de 1957, est de ne pas envisager les possibilités de financement de l’Agence en dehors du COM (non défini) et de la limitation des possibilités pour l’agence de faire du B to C, ce qui est pour le moins aberrant. Les lobbys ont agi mais le Parlement ne s’honorerait pas d’y céder. Rappelons que le SNJ avait fait une proposition de création d’une Fondation indépendante susceptible de recueillir des financements. Cela mériterait réflexion pour le moins.

    La suppression envisagée de la Commission de contrôle financier pour la remplacer par un contrôle de la Cour des Comptes n’est sans doute pas une bonne idée. Cela nous assimilerait aussi davantage à un service de l’Etat ou une collectivité locale et introduirait encore des éléments de lenteur et tout de même d’inefficacité par rapport aux contingences commerciales de l’agence.

    Le plus dangereux pour l’agence est la façon dont est envisagée la composition du Conseil d’administration, au coeur du projet censé traiter de la gouvernance de l’AFP. Il s’agirait de "coopter" six personnalités connues pour "leurs compétences en matières de presse" sans plus de précisions (sauf celle soulignant qu’il y aura "au moins" une personnalité étrangère). C’est évidemment la porte ouverte au pire népotisme, au règne des copains et aux dérapages en matière d’indépendance et de liberté d’expression.

    Le SNJ-AFP n’est pas opposé à une réduction de la place des SPQR et SPQN, sans sous-estimer la place de la presse française dans les revenus et l’environnement de l’agence comme semble le faire la commission sénatoriale (tout en cédant paradoxalement à des pressions pour empêcher l’Agence de commercialiser ses produits !), mais pas pour les remplacer par des "personnalités" cooptées sur des critères flous. Des définitions strictes d’organisations professionnelles, françaises ou étrangères, seraient plus appropriées pour avoir des représentants motivés et échappant à tout soupçon de conflit d’intérêt.

    Sans rejeter a priori une possibilité de "toilettage" du statut de 1957, le SNJ-AFP met en garde contre ces aspects dangereux du projet tel qu’il est présenté aujourd’hui. Il appelle à un large consensus politique pour l’adoption d’une modification du statut de l’AFP ce qui n’est pas compatible avec la précipitation pré-électorale actuelle. Il appelle le personnel de l’Agence à exiger une concertation et des consultations avec le PDG, largement inspirateur de certains aspects du projet, et la Commission sénatoriale.

    Le SNJ-AFP appelle à participer à l’Assemblée Générale d’information ce jeudi 26 mai à 14H00 rue Vivienne et donner vos avis sur la motion qui y sera proposée en vue de la faire connaître à l’opinion et aux législateurs.

    SNJ-AFP - le 26 Mai 2011

     
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    Réforme du statut : un projet néfaste qui doit être combattu

    Communiqué du Syndicat général des Journalistes FO

    Une nouvelle fois, le personnel de l’AFP se voit confronté à la volonté des pouvoirs publics et du PDG de l’agence de vouloir imposer une réforme du statut de l’agence.

    Profondément attachée aux principes d’indépendance et de démocratie qui sont la marque du Statut de 1957, Force Ouvrière considère que cette nouvelle tentative de modification du statut, se révèle, comme les précédentes, totalement contraires à l’esprit de ce statut et, qui plus est, ne lui garantit en aucune manière les moyens de son développement, bien au contraire.

    Alors que l’objectif affiché au début de son mandat par M. Hoog était seulement de modifier la "gouvernance" de l’agence, la proposition de loi signée par M. Legendre, président (UMP) de la Commission des Affaires culturelles du Sénat, constitue bien un bouleversement total de notre statut et du mode de financement de l’agence, comme M. Hoog le reconnaît lui-même dans sa note du 19 mai diffusée au personnel.

    Il est vrai que notre PDG, par l’entremise de ses avocats, n’avait pas hésité récemment à qualifier le statut - dont il est théoriquement le garant - "d’inconstitutionnel". Et que son enthousiasme évident vis-à-vis de la proposition du sénateur Legendre, nous laisse à penser qu’il n’est pas pour rien dans sa rédaction.

    Cette proposition de loi renforce en fait le rôle de l’Etat dans le fonctionnement de l’agence, comme dans ses financements, sans régler vraiment le problème du poids des administrateurs presse au sein du Conseil d’administration.

    En effet, le nombre des représentants des clients presse au CA passerait de 10 à quatre (3 représentants de la presse écrite et de la presse en ligne et un de l’audiovisuel). Mais ces derniers auraient le pouvoir de coopter au CA 6 personnalités dites indépendantes, au sein desquelles serait choisi le PDG. Sur quels critères, selon quelles modalités, avec quelles garanties sur leur indépendance, avec quelles possibilités de recours seraient nommées ces personnalités ? La proposition de loi n’en fait nullement état.

    C’est le risque de voir s’accroître, au travers de ces personnalités, soit le rôle de l’Etat (déjà doté de trois représentants sans compter celui de l’audiovisuel, s’il est de l’audiovisuel public), soit celui des groupes de presse et des pouvoirs économiques sur le fonctionnement de l’agence, en violation évidente du Statut.

    Jusqu’à présent, l’Etat n’est pas représenté au CA en tant que tel mais par 3 représentants des services publics usagers de l’agence. Il le serait demain par 3 représentants es-qualité. Même si on peut juger la nuance minime, elle a son importance sur le fond : il s’agissait, dans le statut de 57, de bien marquer l’indépendance vis-à-vis du pouvoir politique, l’Etat n’étant représenté qu’en tant que client et non comme tutelle. Ce qui ne serait plus le cas.

    Dans le même temps, la proposition Legendre-Hoog corsète totalement le développement de l’AFP sur le marché des nouveaux médias en France en édictant le principe "d’étanchéité des rôles respectifs de l’AFP et de la presse quotidienne" et écartant "toute transformation de la relation historique fournisseur/client entre l’AFP et la presse quotidienne en une relation concurrent/client".

    M. Hoog, qui nous avait "vendu" son projet de nouvelle gouvernance comme un moyen de faire passer son projet B to C et de diminuer le poids des administrateurs presse au sein du CA, semble apparemment avoir tourné casaque, puisque cette disposition en sonne le glas à tout jamais (du moins en langue française). Cela en dit long sur la constance des convictions de notre PDG.

    Il est d’ailleurs frappant de constater combien la proposition Legendre-Hoog ne s’appuie sur aucun projet cohérent de développement, aucune stratégie d’avenir.

    Pire. La proposition Legendre-Hoog va très loin dans la défense zélée des intérêts des patrons de la presse écrite (qui eux ne se gênent pas pour concurrencer l’AFP) puisque l’exposé des motifs n’hésite pas à affirmer, au mépris de toute réalité et en inversant les rôles, que la presse quotidienne régionale "constitue une source importante pour l’AFP dont le fil reprend chaque jour de nombreuses informations locales délivrées dans ses éditions et sur ses sites".

    Comment, avec ce genre d’arguments, ne pas donner raison aux clients presse dans leur volonté de ne pas payer les services de l’AFP à leur juste valeur, revoir leurs contrats à la baisse, voire tout simplement se désabonner comme certains l’ont déjà fait. Les commerciaux de l’agence apprécieront, comme les journalistes qui collectent chaque jour l’information sur le terrain et pas dans les pages de la PQR, malgré un manque de moyens de plus en plus criant.

    La proposition de loi Legendre-Hoog renforce également le poids de l’Etat dans la gestion financière de l’AFP.

    Comme dans la composition du Conseil d’administration, on passe d’une notion d’Etat client à une notion d’Etat-tutelle, ayant la mainmise sur les choix stratégiques de l’Agence.

    En effet, la part Etat dans le financement de l’AFP ne serait plus déterminée dans le cadre d’une convention signée avec l’agence, fixant notamment le nombre et le taux des abonnements souscrits par les services publics de l’Etat, mais par "la compensation financière des coûts nets générés par l’accomplissement par l’agence de missions d’intérêt général" définis dans le cadre d’un contrat d’objectifs et de moyens pluriannuel.

    C’est dans le cadre de ce contrat d’objectifs et de moyens (désormais inscrit dans le statut) que l’Etat définirait lui même les missions d’intérêt général faisant l’objet d’une compensation financière de sa part et le montant de celle-ci. Autrement dit, sa participation financière n’étant plus assise sur des abonnements quantifiables, le gouvernement - qui signe le contrat d’objectifs et de moyens - aurait tout pouvoir.

    Celui notamment de décider quelles activités font partie ou non des "missions d’intérêt général", de leur coût supposé, des éventuelles restrictions budgétaires...

    Ce serait priver l’agence d’un financement pérenne. D’autant que la proposition Legendre-Hoog exclut d’emblée que les ressources publiques puissent excéder le montant du coût net d’exécution des dites obligations. Autrement dit, elle donne le pouvoir à l’Etat de payer a minima pour des "missions" a minima.

    Pour le reste, l’AFP, désormais considérée comme un organisme de droit privé comme les autres et non plus comme un "organisme autonome doté de la personnalité civile" pourrait recourir à l’emprunt, y compris via des titres participatifs. (A quand le retour d’un capital ?)

    FO a toujours considéré que l’agence elle-même, par le rôle qu’elle joue dans la collecte et la diffusion d’une information pluraliste, indépendante et de qualité, et par le rôle démocratique qu’elle joue au service de la liberté de la presse en France et dans le monde, était d’intérêt général.

    La notion de "missions d’intérêt général", inventée par l’Union européenne pour légitimer la privatisation de fait de tout ou partie des services publics dans l’espace européen, fait courir une menace évidente sur l’intégrité de l’AFP, qui pourrait se voir demain contrainte d’abandonner, faute de financement suffisant, des pans de son activité considérés comme n’entrant pas dans ce cadre.

    L’Etat verrait également son rôle de contrôle financier renforcé avec la suppression de la Commission financière, instituée dans le statut comme garantie d’indépendance vis-à-vis des administrateurs, et l’entrée de l’AFP dans le droit commun. Le PDG devrait désormais rendre compte directement au pouvoir politique puisque le contrôle s’effectuerait désormais via le rapport annuel sur la mise en oeuvre du contrat d’objectifs et de moyens adressé par le PDG au Parlement et aux ministres intéressés et par la Cour des Comptes.

    Sur le fond, le projet Legendre-Hoog ne ferait donc que conforter le désengagement financier de la presse et de l’Etat dans le financement de l’agence, tout en réduisant ses possibilités de développement et en portant atteinte à son indépendance.

    Sur la forme, M. Hoog nous refait le coup de Louette. Ce dernier était passé du "toilettage" à l’ouverture du capital. Aujourd’hui on passe de "la nouvelle gouvernance" à la refonte du statut. Oubliés les discours sur la nécessité d’un consensus pour toute réforme éventuelle du statut, en interne et au sein de la représentation nationale.

    Hier, la réforme du statut n’était pas une priorité. Aujourd’hui M. Hoog veut un débat parlementaire "le plus tôt possible" sur la proposition Legendre et il invite même le gouvernement et le Parlement à en fixer la date. Le tout à quelques mois de l’élection présidentielle.

    M. Hoog nous dit qu’il veut mobiliser la représentation nationale autour des "ambitions légitimes" de l’AFP. Il oublie juste une chose, c’est l’avis du personnel. Qui n’a jamais été sollicité et encore moins consulté, malgré les engagements qu’il avait pourtant pris en ce sens. Nous avions, il est vrai, déjà eu quelques occasions de mesurer le peu de cas qu’il en fait, sur le déménagement notamment.

    Nous le lui redisons donc avec force.

    Comme il l’a montré lors de l’Assemblée générale de ce jour, le personnel n’acceptera pas plus aujourd’hui qu’hier, une réforme du statut imposée à la hussarde qui en dénaturerait la lettre et l’esprit.

    Nous défendrons coûte que coûte l’indépendance et l’originalité de l’AFP, comme nous l’avons déjà fait contre les précédents PDG de passage et les différents gouvernements. La proposition Legendre-Hoog doit être rejetée !

    Force Ouvrière - Paris, le 26 mai 2011

     
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    Réforme du statut : avancées, zones d’ombres, interrogations, que faut-il en penser ?

    Communiqué de la Société des journalistes de l’AFP (SDJ)

    La Société des Journalistes comptait exprimer son point de vue lors de l’AG de jeudi au siège. Il lui a été proposé de le faire une fois le vote passé, et donc l’AG terminée. Sans commentaire. Voici, donc par écrit, nos réflexions sur les projets de réforme du statut.

    La proposition de loi déposée par le sénateur Jacques Legendre mérite évidemment toute notre attention. Elle propose bien davantage qu’une seule réforme de la gouvernance.

    La modification de la composition du Conseil d’administration est évidemment une avancée, ne serait-ce qu’en réduisant le poids d’une presse française régionale et départementale, dont l’importance n’a plus rien à voir avec le monde d’aujourd’hui. Pour autant, le projet contient quelques zones d’ombre sur ce point.

    Il suggère de ramener à quatre le nombre des administrateurs de la presse française (contre dix actuellement) et propose que six personnalités indépendantes soient nommées par le reste du CA. Ce dernier comprendrait aussi trois représentants de l’Etat et deux représentants élus du personnel de l’agence, soit un total de 15 membres. Mais le mode de désignation des six personnalités indépendantes, leur provenance et les critères qui pourraient être retenus, ne sont nullement explicités. Or leur indépendance se jouera d’abord sur leur mode de désignation.

    L’exposé des motifs de la loi évoque par ailleurs, parfois de façon très précise, l’activité de l’agence et ses choix stratégiques.

    Elle propose ainsi une agence interdite de diffusion d’infos gratuites en français en France. Il nous serait donc impossible, à en croire ce préambule, de nous doter d’un site internet d’informations en français (sauf à le baser au Québec ?). En clair, pas de B to C en français, alors même que cette proposition de loi a pour rôle essentiel de réformer le conseil d’administration afin d’y réduire le poids de la presse française, notoirement opposée aux projets de la direction de l’AFP en la matière. Comprenne qui pourra.

    L’affaire se complique quand on constate à la lecture de la proposition proprement dite qu’elle ne contient rien de ce qui est exposé dans ce préambule. Aucun article ne vient interdire à l’AFP de s’adresser directement aux particuliers.

    L’exposé des motifs renvoie également à un statut des agences remontant à l’ordonnance de 1945, selon laquelle nous ne pouvons disposer d’aucun revenu publicitaire. Mais c’est oublier ou feindre d’oublier que l’AFP partage déjà des revenus publicitaires sur le web en France et ailleurs. Là encore, la proposition en tant que telle n’en souffle mot. Sauf à penser que le Contrat d’objectifs et moyens, le fameux COM, introduit solennellement dans les statuts, prévoirait pareille disposition.

    Ce dernier point est également sujet à caution. En introduisant le COM dans les statuts, on rapproche l’AFP, entité juridique sui generis qui n’est ni un service public, ni une société privée, du statut d’entreprise publique, au risque d’une étatisation rampante.

    Enfin, la proposition du sénateur Legendre prévoit en son article 11 que "les ressources publiques allouées à l’Agence France-Presse en compensation des missions d’intérêt général mises à sa charge n’excèdent pas le montant du coût net d’exécution desdites obligations".

    Doit-on comprendre que l’Etat, quand il voudra limiter les moyens de l’AFP, pourra toujours invoquer cet article pour justifier son refus de payer pour l’extension du réseau non francophone ? Ou bien faut-il au contraire y voir une manière de sanctuariser sa contribution à l’agence ? Dans les deux cas, comment calculera-t-on de façon fiable le coût net d’exécution des missions d’intérêt général dans le bilan de l’agence ? De quel bureau, dépêche, photo, vidéo, service parlera-t-on ? Qui aura droit au tampon "service public" et qui à la mention "activité commerciale" ?

    Pour toutes ces raisons, la SdJ partage l’inquiétude d’une partie du personnel, telle qu’elle a été exprimée lors de l’AG de jeudi.

    Elle s’associe à la demande d’un référendum du personnel, comme cela a été le cas en 1957, et souhaite aussi le consensus le plus large au Parlement.

    Elle invite le personnel à prendre connaissance directement de cette proposition de loi afin qu’il soit en capacité de juger pleinement des menaces et des avancées qu’elle contient. Nous rappelons qu’elle est disponible sur le site du Sénat français et sur ASAP : http://www.senat.fr/leg/ppl10-522.html.

    Elle rendra compte également de tous les avis d’experts qu’elle aura pu solliciter, pour mieux vous éclairer sur cette proposition de loi qui engage notre avenir.

    Et bien entendu, n’hésitez pas à nous faire part de vos propres réflexions, remarques et suggestions à l’adresse ca.sdj@afp.com

    Le CA de la SdJ

     


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    Emmanuel Hoog : son communiqué du 19 mai

    « PARIS, 19/05/2011 - 1006 - Jacques Legendre, Président de la Commission des Affaires culturelles du Sénat, a déposé une proposition de loi visant à réformer le statut de l’AFP. »

    « Cette proposition réaffirme l’indépendance de l’Agence et garantit l’originalité de son statut, tout en modifiant celui-ci qui, au cours des ans, a montré combien il mérite d’évoluer. »

    « La récente Question Préalable de Constitutionnalité, qui a considéré comme inconstitutionnelle le mode d’élection des représentants des personnels au conseil d’administration, en est un témoignage particulièrement éclairant. D’ailleurs, dans le commentaire de sa décision, le Conseil Constitutionnel écrit lui-même que d’autres dispositions du texte pouvaient faire l’objet d’un débat constitutionnel. »

    « La nouveau statut s’il est adopté :

    • ancre une nouvelle fois dans la loi les articles 1 et 2 ;
    • renforce la vocation internationale de l’agence tout en soulignant sa spécificité francophone ;
    • reconnaît l’AFP comme porteur de mission générale ce qui permet de garantir son financement public et de le pérenniser ;
    • réorganise la gouvernance, en diminuant le conflit d’intérêts qui place les clients dans une position dominante au sein du conseil d’administration ;
    • lutte contre l’excès de changement de direction en assurant un mandat de 5 ans renouvelable au PDG ;
    • simplifie les procédures financières et budgétaires en les plaçant dans le droit commun ;
    • instaure un véritable contrat d’objectifs et de moyens. »

    « L’AFP mérite un débat parlementaire le plus tôt possible. Le gouvernement et le parlement ont la responsabilité d’en fixer la date. »

    « Cette proposition de loi doit être l’occasion de porter en avant les forces et les réussites de l’agence, et de mobiliser la représentation nationale autour de ses ambitions légitimes, dans un monde médiatique qui a besoin, plus que jamais, de grandes signatures, de référence, d’une grande agence. »

    Emmanuel Hoog, le 19 mai 2011


    Emmanuel Hoog : son communiqué du 1er juin

    « Chères collaboratrices, chers collaborateurs,

    « Après avoir appris le dépôt, par le sénateur Legendre, d’une proposition de loi relative à la gouvernance de l’Agence France-Presse, je vous ai adressé, le 19 mai dernier, un communiqué qui résumait ma vision de ce texte et qui est joint au présent courrier. Depuis cette date, un rapporteur, M. Jean-Pierre Leleux, a été désigné pour instruire cette proposition de loi. De mon côté, j’ai répondu aux interrogations des cadres de l’Agence lors du comité de coordination et d’information du 30 mai, ainsi qu’à celles des organisations syndicales et de la société des journalistes le 1er juin.

    « Il m’a semblé important de porter directement à votre connaissance les principales questions qui ont été soulevées par mes interlocuteurs et d’y apporter quelques éléments de réponse.

    « Tout d’abord, je me réjouis que les incertitudes aient été levées et qu’un texte, annoncé depuis plusieurs mois, ait été déposé. Comme j’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises, le statu quo est impossible : nous devons répondre à une plainte contre l’Agence à Bruxelles et la situation actuelle n’est plus tenable, qui consiste à affirmer - contre toute évidence - que la centaine de millions d’euros versée chaque année par l’Etat relève d’une relation strictement commerciale. Je crois très largement préférable d’agir de manière préventive - en inscrivant dans la loi la possibilité pour l’Etat de financer des missions d’intérêt général en plus de l’abonnement qu’il souscrit en tant que client de l’Agence - , plutôt que curative après avoir été condamné pour aide d’Etat par la Commission européenne, avec toutes les conséquences financières désastreuses qu’une telle condamnation pourrait avoir pour l’Agence. La proposition de loi contient d’autres avancées intéressantes. Par exemple, qui pourrait être hostile à l’ajout de la défense du français dans les obligations fondamentales assignées à l’Agence par le législateur ? De même, faut-il rejeter l’allongement de la durée du mandat du PDG ? Faut-il rappeler qu’en 25 ans, AP et Reuters ont eu deux présidents alors que l’AFP en a connu huit, dont trois démissionnaires ?

    « Ce texte doit cependant être remis à sa juste place. Il s’agit d’une proposition de loi "relative à la gouvernance de l’Agence", pas d’un nouveau statut. Je me dois de tordre le cou dès ce stade à cette idée, qui a pu être exprimée et qui fonde le parallèle entre la période que nous vivons et celle qui précéda l’adoption du statut de 1957. Nous vivrions un changement de statut si la proposition de loi procédait à un changement de la forme juridique de l’Agence et à sa transformation en société anonyme, ou encore à une révision radicale de ses "obligations fondamentales". Aujourd’hui, rien de tel. J’ajoute, pour ceux qui persistent dans le parallèle historique, qu’on pourrait citer Paul-Louis Bret, directeur général de l’Agence au moment de la discussion du statut de 1957, et tous ceux qui, à cette époque, avaient bien vu toute l’ambigüité du financement public, allant même jusqu’à parler de "camouflage" du financement public de missions d’intérêt général sous les habits d’un abonnement de nature commerciale aux services de l’Agence. Si une telle situation était vivable en 1957, elle ne l’est plus aujourd’hui avec une Commission européenne dans laquelle la direction générale de la concurrence a pris une importance cardinale et qui veille au grain pour s’assurer que toute intervention publique est conforme aux règles du traité de l’Union européenne en matière d’aides d’Etat. On peut le regretter mais c’est ainsi.

    « Y avait-il urgence pour le Parlement à se saisir du sujet ? Je le redis : la Commission européenne est en train de regarder dans le détail nos modalités de financement, sous la pression d’un de nos concurrents allemands très actif et qui s’apprête d’ailleurs à venir nous concurrencer, en photo, sur le territoire français. Le "camouflage" dont parlait Paul-Louis Bret n’est plus tenable et Bruxelles nous presse de clarifier la situation, et de faire la part de la relation purement commerciale entre l’Etat et l’Agence, et du financement des missions d’intérêt général. A défaut, nous risquons purement et simplement de nous voir interdite de toute forme de financement public par les autorités européennes de la concurrence.

    « La première question à laquelle il me faut répondre, et qui est le seul sujet de fond soulevé, est celle de l’indépendance : oui ou non ce texte porte-t-il atteinte à l’indépendance de l’Agence ? Est-ce porter atteinte à l’indépendance que de réduire le poids de nos clients historiques au sein du conseil d’administration ? Est-ce porter atteinte à l’indépendance que donner plus de pouvoir aux représentants des salariés en les associant au choix des personnalités qualifiées au même titre que les représentants des médias ou de l’Etat ? Répondre par l’affirmative n’aurait aucun fondement juridique, technique ou politique. Bien au contraire, ce texte permet de combler les fragilités et de "réarmer" l’AFP pour les années futures : la presse n’est plus majoritaire et n’est donc plus à même de bloquer des décisions qui vont dans le sens du développement de l’Agence mais contrarient leurs intérêts de clients ; les représentants des salariés - désormais élus sans condition de nationalité - participent à la cooptation des personnalités qualifiées ; le conseil est ouvert à des personnalités de nationalité étrangère qui viendront apporter un autre regard. Où est la perte d’indépendance ?

    « Revenons un instant sur la très belle formule de Jean Marin disant que " l’AFP ne peut fonctionner que si celui qui paye ne commande pas". Force est de constater que le déterminisme économique l’a emporté sur l’idéal et que nous sommes aujourd’hui dans la situation que ne voulait pas Jean Marin. Soit nous prenons acte pour l’avenir que ceux qui paient - nos clients - décident et alors en effet il ne faut rien changer. Soit nous voulons revenir à l’idéal de Jean Marin, et nous devons nous réjouir d’un texte qui vise justement à permettre à ceux qui ne paient pas - les personnalités indépendantes et les représentants des salariés - de décider.

    « Je voudrais également insister sur la place nouvelle prise dans ce texte par les représentants des salariés au conseil d’administration de l’Agence. La proposition de loi prévoit une composition dynamique de celui-ci en deux étapes, avec un socle de neuf administrateurs (quatre représentants des médias, deux représentants des salariés et trois représentants de l’Etat) qui seront chargés de coopter six personnalités indépendantes. Au lieu de disposer de deux voix sur 16 de façon indifférenciée, soit 12,5%, les représentants du personnel font désormais partie du socle, dont ils représentent 22,2% : c’est presque un doublement de leur responsabilité. Désormais, la responsabilité des élus du personnel est RENFORCEE DE MANIERE SIGNIFICATIVE. En effet, ils participent à la désignation des six personnalités indépendantes, parmi lesquelles figure le futur PDG.

    « A cet égard, une question revient souvent : qu’est-ce qui garantit que les six personnalités indépendantes le seront véritablement ? Les personnels et les représentants des médias disposent d’une majorité absolue pour la nomination de ces personnalités. Si cela n’est pas considéré comme une garantie, cela signifie que, soit les représentants de la presse, soit les représentants du personnel pourraient être considérés comme "dépendants" : qui oserait l’affirmer ? Et si quelqu’un osait, que dire alors de la situation actuelle dans laquelle les représentants de la presse sont majoritaires ? Par ailleurs, quelle est la capacité de contrôle du conseil d’administration sur la production de l’Agence ? La question relève du procès d’intention, à mille lieux de tout ce que je peux constater du fonctionnement quotidien de l’Agence et de son histoire. L’indépendance de l’AFP appartient fondamentalement à la force et à la vivacité de sa rédaction et de sa direction. Par ailleurs, tant que je serai à la présidence de l’AFP, jamais je n’accepterai, par un conseil d’administration ou par quelque autorité que ce soit, que la liberté de la rédaction soit discutée, menacée, contrôlée ou amendée. Au-delà de moi-même, chacun le sait, toute autre attitude serait intenable, préjudiciable et condamnée, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Agence.

    « La deuxième interrogation renvoie au spectre de la "boîte de Pandore" qui serait ouverte par l’examen d’un texte concernant l’AFP par le Parlement. Ce risque doit être évacué et me paraît relever largement du fantasme. Le texte est déposé par un sénateur de la majorité, par ailleurs président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, ce qui signifie que les dispositions de cette proposition de loi ont été rédigées en lien étroit avec le Gouvernement et avec les représentants de la majorité dans les deux assemblées. Il s’appuie très largement sur des auditions ouvertes que j’ai pu faire devant les commissions des affaires culturelles des deux assemblées, au cours desquelles de très nombreuses voix, issues des rangs de la majorité et de l’opposition, ont salué la sagesse et la mesure de nos positions. Le risque d’une évolution significative du texte dans un sens contraire aux intérêts supérieurs de l’Agence me semble donc très faible, pour ne pas dire nul. En revanche, il paraît légitime que des amendements voient le jour pour clarifier, préciser, tel ou tel point du dispositif, c’est l’enjeu même du débat parlementaire.

    « Je répondrai ensuite aux autres interrogations qui se sont légitimement exprimées :

    • Est-ce une tentative de modifier "à la hussarde" le statut de 1957, sans concertation ? Ceux qui le prétendent oublient que ces débats sont sur la table depuis bien longtemps (projet de mon prédécesseur [Pierre Louette], rapport Pigeat, etc.). J’ai dès mon arrivée défendu l’idée que le statut de l’Agence avait besoin d’être adapté à son temps, en particulier pour ce qui concerne la composition du conseil d’administration de l’Agence et la durée des mandats. J’ai eu maintes occasions de m’exprimer sur le sujet, que ce soit devant le comité d’entreprise, le CCI, les commissions compétentes de l’Assemblée nationale ou du Sénat. Je vous invite à vous reporter aux procès-verbaux de mes auditions, qui sont des documents publics ; mon discours n’a pas varié.
    • Y a-t-il un risque de voir le financement public de l’AFP se réduire ? C’est tout le contraire car, aujourd’hui, toute idée de "saut" qualitatif ou quantitatif de l’Agence est impossible : la fiction d’une relation purement commerciale avec l’Etat conduit celui-ci à reconduire d’une année sur l’autre le montant de son financement, sans qu’il soit possible de le mobiliser pour aider l’Agence à franchir un palier de son développement. De son côté, le texte en discussion permet de sécuriser le financement public vis-à-vis de Bruxelles et d’autoriser le financement de nos projets de développement dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens. Si nous savons convaincre l’Etat de la pertinence de nos projets de développement, nous obtiendrons de lui une avancée budgétaire qui aurait été injustifiable dans une logique purement "commerciale ". Je dis du nouveau mécanisme qu’il autorise des avancées, à nous de faire de celles-ci un engagement durable de la part de l’Etat. Aujourd’hui, ce que je sais, c’est que la situation juridique l’interdit. Autorisation législative française contre interdiction administrative bruxelloise : le choix est simple.
    • La proposition de loi conduit-elle à "plafonner" la subvention versée en compensation des missions d’intérêt général ? La phrase qui figure dans le texte ("les ressources publiques allouées à l’Agence France-Presse en compensation des missions d’intérêt général mises à sa charge n’excèdent pas le montant du coût net d’exécution desdites obligations") est une formule technique utilisée par l’ensemble des spécialistes de ce sujet, qui n’est que la transposition en droit français des exigences du droit communautaire. Elle signifie simplement que l’argent public relève, soit de la compensation d’une mission d’intérêt général, soit de la relation commerciale, mais qu’il ne peut pas relever d’une troisième catégorie. Mais je peux comprendre les interrogations qui peuvent naître de cette phrase ; dans les prochaines semaines, conformément à l’esprit et à la lettre de ce message, la phase de dialogue et de débat que j’appelle de mes vœux permettra d’y répondre.
    • Ce texte nous enferme-t-il dans le "carcan" des contrats d’objectifs et de moyens ? Je rappelle tout d’abord que nous disposons déjà d’un contrat d’objectifs et de moyens. Mais ce contrat n’est pas satisfaisant dans son ambition car il n’est explicite, ni sur les objectifs, ni sur les moyens. J’ai une longue expérience, tirée de mon passage à la tête de l’INA, des négociations avec les services de l’Etat pour la conclusion de ces contrats. Et je sais qu’il peut en sortir le meilleur si nous inscrivons nos demandes dans le cadre d’une stratégie d’entreprise claire et cohérente. Elle est aujourd’hui à l’œuvre. Les chantiers ouverts, la présentation stratégique faite au comité d’entreprise du 16 décembre 2010, sont autant d’éléments qui donnent à notre entreprise de vraies perspectives. Aujourd’hui, la langue arabe, le développement de la vidéo, les plans Inde et Brésil sont autant de sujets qui, pour être ambitieux, ne donnent lieu à aucune discussion sérieuse avec l’Etat, nous contraignant à un développement à pas comptés.
    • L’exposé des motifs de la proposition de loi conduira-t-il à nous interdire toute activité dite "B2C" en direction du consommateur final ? Un exposé des motifs n’est pas la loi. Le texte de loi lui-même n’interdit pas à l’Agence de développer un service B2C et ne peut pas l’interdire car cela serait enfreindre plusieurs principes de nature constitutionnelle - tels que la liberté d’entreprendre ou le principe d’égalité - ; j’ajoute que cela reviendrait à interdire à l’AFP ce que fait Reuters sur son site Internet en français, et donc à nous mettre dans une situation d’inéquité concurrentielle qui ne serait pas acceptable et qui ne serait pas compréhensible : comment imaginer, à l’heure où la proposition de loi consacre notre contribution au rayonnement de la langue et de la culture françaises dans le monde, que l’AFP soit la seule agence à ne pas être présente en B2C dans sa propre langue ? Enfin, notre stratégie de présence sur Internet dépasse largement la seule question du B2C : toutes les options sont ouvertes ; vous savez que nous travaillons à des applications pour téléphones mobiles et tablettes, qui seront commercialisées prochainement en anglais.
    • La suppression de la Commission financière est-elle la porte ouverte à toutes les dérives budgétaires ? La Commission financière a eu son utilité, sans nul doute ; néanmoins, son avis sur les budgets de l’Agence intervenait systématiquement plusieurs mois après le début de l’année civile, relativisant beaucoup la portée de son intervention même lorsqu’il lui arrivait de refuser le budget. Par ailleurs, soyons clair : la commission financière est un faux nez de la Cour des comptes, dont sont issus son Président et tous ses membres. Soyons simples ! J’ajoute que l’Agence est, depuis sa création, placée sous la surveillance de la Cour des comptes comme tous les organismes qui reçoivent des concours publics ou même des fonds issus de la générosité publique. La proposition de loi rappelle simplement et clairement l’état du droit.

    « En termes de calendrier, selon les informations dont nous disposons, le texte pourrait être examiné courant juin par la commission de la culture du Sénat ; l’examen en séance plénière pourrait avoir lieu fin juin ou début octobre, avant discussion du texte à l’Assemblée nationale. Le plus probable est qu’il y ait ensuite une seconde lecture par chacune des deux chambres du Parlement. Le Sénat et l’Assemblée nationale procèderont pendant cette période à des auditions au cours desquelles tous les points de vue pourront s’exprimer. Nous sommes donc au début d’un processus au cours duquel nous pourrons continuer de débattre.

    « J’ai d’ailleurs décidé de poursuivre le débat avec chacune et chacun d’entre vous en créant une adresse électronique à laquelle vous pourrez envoyer toutes vos questions et par laquelle transiteront nos réponses. L’ensemble de ces questions et des réponses apportées sera ensuite mis en ligne sur asap [l’intranet de l’AFP], en laissant à chacune et chacun d’entre vous le choix de rester anonyme ou de voir son identité figurer à côté de la question. Toutes les questions recevront une réponse, je m’y engage. Les organisations syndicales sont également invitées à envoyer leurs questions à cette adresse ; elles disposent aussi de leurs propres espaces pour exprimer leurs positions et animer leur propre débat.

    « Le dialogue et l’explication doivent se poursuivre, ainsi que l’émergence éventuelle de propositions nouvelles qui puissent être transmises au législateur. Toutes les expressions peuvent être légitimement entendues et pourront utilement nourrir le débat parlementaire et, au-delà, l’élaboration du contrat d’objectifs et de moyens. Elles feront ainsi sentir, au-delà de nos murs à tous ceux qui veulent bien nous entendre et être attentifs à nos métiers et aux valeurs que nous portons, combien l’avenir de l’AFP nous est cher au regard de nos missions et de la vision du monde que nous emportons avec nous chaque jour. Je suis, avec la direction de l’Agence, à la disposition de chacune et chacun d’entre vous pour continuer le débat, apaiser les craintes et dissiper les incertitudes.

    « Très chaleureusement et très cordialement, Emmanuel HOOG »

     


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