Mars 2009 : le rapport Louette : « Faire de l’AFP un des leaders mondiaux de l’information à l’ère numérique »

, par Admin

Le texte intégral du document remis par le PDG de l’AFP, Pierre Louette, aux ministères de la culture, du budget et des finances le 31 mars 2009

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Faire de l’AFP un des leaders de l’information à l’ère numérique

Rapport relatif aux évolutions préconisées par l’AFP en ce qui concerne son mode de fonctionnement et son organisation. 31 mars 2009

SOMMAIRE

1. l’AFP DOIT SE REINVENTER POUR FAIRE FACE AUX MUTATIONS DU MONDE DE L’INFORMATION

2. l’AFP DOIT DISPOSER DES MOYENS FINANCIERS DE SES AMBITIONS

3. L’AFP DOIT DISPOSER DU CADRE JURIDIQUE A MEME DE PORTER SES AMBITIONS

4. PREMIERES PROPOSITIONS D’EVOLUTION DU CADRE JURIDIQUE

CONCLUSION

Annexe : historique du document


FAIRE DE L’AFP UN DES LEADERS MONDIAUX DE L’INFORMATION A L’ERE NUMERIQUE

L’Agence de presse, dont le fonctionnement repose sur la religion du fait, a longtemps été la pierre angulaire du marché de l’information.

Mais les conditions même de sa crédibilité constituent également des contraintes : l’entretien d’un ensemble d’implantations géographiques et d’un réseau mondial de journalistes, la charge des transmissions et la recherche d’une « couverture » la plus globale possible sont autant de facteurs d’alourdissement des coûts consubstantiels à l’activité des agences. Autant de raisons aussi qui expliquent le maintien d’un nombre assez faible d’acteurs mondiaux (3 aujourd’hui, dont l’AFP) et la recherche d’un « partage des coûts », soit par la voie coopérative, soit dans la relation à la puissance publique.

Signée de trois ministres (Economie, Budget, Culture et Communication), une lettre de mission a confirmé la volonté du Gouvernement, déjà consignée dans le COM 2009-2013, de voir le président de l’AFP engager une réflexion sur l’évolution de son statut, tel que résultant de la loi n°57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l’AFP (le « Statut de 1957 »).

C’est l’objet du présent rapport que de présenter les premières propositions en ce sens de l’Agence France-Presse (l’« AFP » ou l’ « Agence »).

Cette réflexion est ouverte. Sa conclusion n’a pas été livrée avec la lettre, ni n’était tenue à disposition dans le secret d’un cabinet ministériel. Cette réflexion est libre. Nous ne sommes tenus ni par une contrainte idéologique, ni par une aveuglante fascination pour la modernité.

A l’observateur honnête, deux évidences s’imposent :

  • le Statut de 1957 a été un véritable progrès pour l’Agence - auparavant établissement public et soumise à une étroite influence gouvernementale - et il faudra quoiqu’il advienne conserver de ce texte ce qui fait sa qualité première, l’affirmation et la protection de l’indépendance rédactionnelle ;
  • le Statut de 1957 n’a pas su appréhender la dimension économique de l’activité de l’Agence et l’a privée d’une véritable capacité de développement : combien d’occasions ratées (l’information financière dans les années 60, la vidéo internationale dans les années 90,...), faute de moyens pour investir et pour se projeter dans de nouveaux métiers ou de nouveaux média ?
  • « Statut de la Liberté » selon la jolie expression de Jean Marin, la loi de 1957 est aussi « le statut du statu quo » : aucune chance de se réinventer en profondeur tout en restant fidèle à sa tradition d’indépendance, aucune chance de se développer vraiment, de « bousculer les évidences »…

Une bonne illustration de cette fatalité à « rester tel que l’on est » nous est fournie par le périmètre des effectifs de l’AFP : l’Agence comptait 1200 salariés permanents avant la guerre, elle en comptait 1920 en 1963 et 2200 aujourd’hui. Reuters, née un peu après l’Agence Havas, en a compté jusqu’à 22 000 après avoir développé ses activités d’information financière, sans jamais abandonner l’agence généraliste, mais au contraire en contribuant à la faire vivre.

Cinquante ans après la promulgation du Statut de 1957, le nouveau contexte qui est le nôtre, celui de la révolution numérique, du bouleversement des modèles d’affaires et de consommation des informations, mais aussi celui d’une crise sans précédent, nous impose de repenser le mode de financement de l’Agence.

A coté de ses abonnements, l’Etat a pu jusqu’à maintenant compenser par des dotations en fonds propres et des abandons de créances, tout à la fois le coût des obligations de rayonnement mondial imposées à l’AFP et la relative faiblesse de la presse française. Mais les défis auxquels est confrontée l’Agence réclament des moyens plus importants et plus souples.

L’Etat n’entend certes pas renoncer à sa contribution traditionnelle au fonctionnement de l’Agence, parce qu’il en est un grand client et qu’au surplus celle-ci, en tant qu’acteur de la francophonie, du rayonnement national et du soutien démocratique indirect à la presse française, assure des missions d’intérêt général essentielles.

Mais l’Etat souhaite que l’Agence s’appuie enfin - sans rien retirer à l’indépendance de son travail inlassable de recherche de l’information, de vérification, de diffusion aussi - sur d’autres concours, quand il s’agit de venir appuyer et suivre un projet de développement, une mutation informatique, une évolution stratégique. Il faut que la dimension économique des projets de l’Agence trouve des soutiens économiques.

Le législateur de 1957, cela a été souvent souligné, a fait œuvre originale. Nous sommes appelés aujourd’hui à proposer une évolution de ce cadre, un élargissement et un enrichissement des perspectives de l’AFP, sans abandonner ce qui constitue le socle ontologique de l’Agence : son indépendance et sa contribution à l’une des plus belles des libertés, celle de se forger une opinion, et de faire des commentaires, à partir de faits avérés.

 

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1. l’AFP DOIT SE REINVENTER POUR FAIRE FACE AUX MUTATIONS DU MONDE DE L’INFORMATION

« Grossiste en informations », au service des médias depuis sa création, l’AFP a su depuis 1957 accompagner la naissance de nouvelles familles de clients : radios, télévisions, puis acteurs nés de l’internet ou prolongements sur l’internet d’acteurs classiques.

L’AFP peut donc revendiquer une tradition d’adaptation, même si celle-ci paraît parfois trop lente. Mais il ne s’est agi jusqu’ici que d’apporter des réponses à de nouveaux clients, sur de nouveaux supports, et non de faire face à une mutation du modèle d’affaires même affectant toutes les agences de presse sur un marché désormais mondialisé, où nos propres clients deviennent de nouveaux concurrents, où chacun cherche à développer son chiffre d’affaires en réinventant son modèle, fût-ce en empiétant sur le territoire traditionnel de l’autre.

Ainsi se pose la question-clé : comment donner à l’Agence France-Presse les moyens de relever des défis sans équivalent depuis sa création ?

 

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1.1 L’AFP : un outil d’information au service de l’intérêt général

L’AFP a été refondée en 1957 à la fois pour servir le développement des médias français et francophones, notamment la presse écrite régionale, et pour contribuer au rayonnement de la France

Aux origines de l’AFP, on trouve le « Bureau Havas » de 1832, devenu en 1835 l’Agence Havas, après avoir absorbé ses principaux concurrents.

Rechercher et distribuer les nouvelles, telle est la mission depuis le début, au profit de tous les journaux – puis des autres médias – dans l’incapacité de collecter l’information par leurs propres moyens à travers le monde : syndication de moyens, économies d’échelle, service du plus grand nombre sont des principes inscrits au cœur du fonctionnement de l’AFP.

Le Statut de 1957 reflète l’idée d’associer majoritairement la presse au fonctionnement de l’Agence, tout en ne faisant pas de l’AFP une coopérative, que la presse française n’aurait de toute évidence pu financer. D’ailleurs, au delà du chiffre d’affaires qu’il lui assure du fait de ses propres besoins, l’Etat a régulièrement soutenu l’Agence et ce soutien reflète la volonté du législateur de voir l’Agence garder un statut d’organisme d’information à rayonnement universel.

Cette volonté ou intuition d’origine s’est traduite dans le statut de l’AFP par les missions et obligations d’intérêt général mises à sa charge. Ces missions, quelles sont-elles ?

L’article 2 de la loi du 10 janvier 1957 portant statut de l’Agence précise les obligations fondamentales auxquelles est soumise l’AFP :

  1. « L’Agence France-Presse ne peut en aucune circonstance tenir compte d’influences ou de considérations de nature à compromettre l’exactitude ou l’objectivité de l’information ; elle ne doit, en aucune circonstance, passer sous le contrôle de droit ou de fait d’un groupement idéologique, politique ou économique ;
  2. L’Agence France-Presse doit, dans toute la mesure de ses ressources, développer son action et parfaire son organisation en vue de donner aux usagers français et étrangers, de façon régulière et sans interruption, une information exacte, impartiale et digne de confiance ;
  3. L’Agence France-Presse doit, dans toute la mesure de ses ressources, assurer l’existence d’un réseau d’établissements lui conférant le caractère d’un organisme d’information à rayonnement mondial. »

Partant, les missions d’intérêt général de l’AFP peuvent être organisées autour de trois familles d’obligations, toutes liées à la mission principale et essentielle qui est de fournir une information exhaustive, indépendante, fiable et vérifiée et, dans ce cadre, de participer au rayonnement de la France et de la langue française.

Afin de remplir ces obligations, l’AFP supporte un certain nombre de contraintes.

En premier lieu, l’AFP est soumise à des contraintes en termes de réseau. Pour respecter son obligation d’indépendance mais aussi les critères de fiabilité de l’information qu’elle diffuse, l’AFP dispose d’un réseau « propriétaire », dès l’origine préféré à la mutualisation de moyens avec d’autres agences ou à l’établissement de partenariats. Le réseau de l’AFP se doit d’être complet et de couvrir toutes les régions du monde, quand bien même certaines d’entre elles ne produiraient pas une information à forte valeur ajoutée au regard des attentes du marché.

Il est en outre caractérisé par sa « surdensité » dans certaines régions du monde, notamment la France elle-même ou l’Afrique francophone. Ce choix ne correspond pas à un impératif économique. Les zones couvertes ne sont pas mécaniquement les plus rentables : la densité de couverture est parfois déconnectée de la demande d’information et matérialise généralement le souci d’accompagner la présence de la France dans ses zones d’influence traditionnelles.

Ainsi, par rapport à un réseau cible économiquement optimal, qui serait plus compact et plus concentré sur certaines zones, le réseau de l’AFP répond à une logique d’intérêt général génératrice de surcoûts.

En deuxième lieu, pour assurer sa mission de participation au rayonnement de la France et de sa langue, l’AFP produit une information qui demeure très majoritairement « native » en français.

Cette information est partiellement traduite, mais les clients non francophones exigent une production originale distincte, intégrant des spécificités linguistiques et culturelles propres à leurs langues, qui doublonnent assez largement avec la production en français. L’obligation faite à l’AFP de produire en français et « en multilingue » est ainsi également génératrice de surcoûts.

En troisième lieu, parce qu’elle participe du rayonnement de la France, l’AFP couvre certains évènements strictement français comme certains déplacements officiels de dirigeants en France et à l’étranger. Cette politique de couverture exhaustive de l’actualité institutionnelle française mobilise des moyens sans rapport avec une logique de rentabilité.

Ces missions et obligations sont essentielles et l’AFP y est attachée car elles font en quelque sorte partie de son ADN. Toute réforme devra les confirmer mais devra aussi rechercher les moyens de les mieux définir et de les financer par des mécanismes adaptés et pérennes à même de procurer à l’Agence tout à la fois les moyens d’accomplir ses missions et de répondre à ses ambitions.

 

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1.2 L’AFP : un modèle d’affaires remis en cause par la révolution numérique

Cinq facteurs principaux conduisent aujourd’hui à un bouleversement complet de l’environnement économique et professionnel de l’AFP.

  • a/ La fragilisation des clients historiques de l’AFP : l’apparition et le poids croissant de nouvelles plateformes (sites web d’information et portails généralistes) concurrence les clients traditionnels de l’Agence.

    Cette évolution rapide pose aux agences de presse une double difficulté. D’une part, les nouveaux acteurs n’élargissent guère le marché : ils substituent plutôt de nouveaux usages aux usages traditionnels, fragilisant ainsi les clients historiques de l’AFP et ses débouchés habituels. D’autre part, ces nouveaux acteurs fonctionnent selon un modèle économique et une logique de croissance radicalement différents de ceux de la presse écrite et des médias audiovisuels, tendant à remettre en cause la stratégie d’offre des agences (nature des services, tarification).

  • b/ Le « rich media » et les nouveaux modes d’information du public : les nouveaux modes de consommation de l’information conduisent à mélanger et agréger des briques d’information jusqu’alors séparées par leur nature technique comme par leur mode de production (photo, vidéo, texte).

    La demande de l’internet tend en effet à mêler ou à combiner systématiquement des produits naguère distincts. Répondre à cette demande exige de repenser les modèles d’agrégation des informations dans des offres groupées selon de nouvelles logiques. Cela conduit aussi à redéfinir l’organisation de la production et de l’édition, ainsi que nos schémas tarifaires.

  • c/ La gratuité menace le marché de l’information : la numérisation généralisée de tout type d’information (texte, image, son, vidéo), qui autorise son stockage, sa reproduction et sa transmission à un coût marginal quasi nul, et qui induit par conséquent l’illusion d’un modèle généralisé de gratuité.

    Cette évolution explique la tendance à l’affaiblissement continu de la valeur monétaire attribuée à l’information, la répugnance des consommateurs pour toute forme de paiement, et le développement du piratage facilité par la numérisation généralisée sur l’internet.

  • d/ « Tous journalistes ? » : la multiplication et la décentralisation des sources d’information.

    Sur le web et grâce à lui, chaque individu peut devenir un producteur d’informations d’actualité en diffusant son témoignage, ses photos ou ses vidéos souvent produits et envoyés par le téléphone mobile.

    Ces innovations remettent en cause la logique historique du monopole de l’Agence, traditionnellement seule à même d’assurer la collecte d’informations d’actualité avec l’exhaustivité nécessaire mais sans gaspillage ni duplication de moyens. L’internet autorise au plan technique comme au plan économique la mise en relation directe des sources d’information et des clients finaux.

  • e/ Une modification de la valeur sociale de l’information d’actualité et donc de son utilité économique et marchande.

    Les « nouvelles » (journaux, JT, radio) ont longtemps joué un rôle crucial d’association des individus au mouvement général de la société. Apprendre ce qui se passe dans la vie politique, sociale, culturelle, sportive du pays en le partageant avec des millions d’autres individus était un puissant facteur d’adhésion à la communauté nationale et d’identification collective.

    La multiplication d’autres espaces d’identification collective et le développement sur internet de réseaux communautaires regroupant des individus distants par le moyen d’affinités diverses, autant d’évolutions qui bouleversent radicalement les schémas socio-culturels traditionnels et mettent en cause l’utilité traditionnelle de l’information d’actualité.

Pour l’AFP, ces bouleversements génèrent plusieurs risques qui mettent en cause sa viabilité même :

  • celui d’être moins utile : elle n’est plus la seule à faire ce qu’elle fait, l’information est moins rare ;
  • celui d’être moins payée : moins rare, l’information est moins chère ;
  • celui d’être pillée : le tout numérique sur l’internet facilite le « copillage » ;
  • celui d’être hors jeu, parce qu’elle produirait des informations n’intéressant plus les clients et qu’elle serait dans l’incapacité de produire celles qu’ils demandent.

C’est donc une véritable révolution que l’Agence doit opérer :

  • diversifier et compléter ses contenus, en abandonner d’autres ;
  • associer des objets numériques dans une production multimédia « native » ;
  • mieux protéger ce qu’elle produit.

La « valeur » des actualités ne dérivant plus d’un besoin social, d’une rareté ou d’un coût d’accès élevé, la priorité est de reconstruire, de visualiser et de faire partager la valeur ajoutée apportée par les agences d’information dans la production / diffusion d’actualités.

 

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1.3 L’AFP : les atouts d’un grand du Numérique (première approche d’un nouveau plan de développement et d’expansion)

Dans une période de crise, une « chance dangereuse » selon les Chinois, période de transition à l’évidence, le modèle stratégique doit être repensé, adapté pour être enrichi : une nouvelle stratégie doit permettre à l’Agence de répondre au bouleversement du modèle d’affaires de ses clients traditionnels et au même moment de tirer parti de l’avènement de nouveaux modèles numériques.

 

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1.3.1. Principes et impératifs stratégiques

La stratégie doit naturellement reposer sur les « avantages compétitifs » de l’Agence, ces qualités spéciales, voire uniques, difficiles à imiter : sa marque (dont les « attributs » sont le sérieux, l’indépendance éditoriale, le caractère mondial, la quasi-exhaustivité…), son savoir-faire reconnu en six langues, la qualité de son réseau de collecte, de distribution et de vente…

Déclinée selon la classique trilogie « make/team/buy », qui laisse toute sa place au rôle et aux qualités des personnels de l’entreprise mais n’exclut pas de s’appuyer sur des compétences externes quand il s’agit d’activités complémentaires ou pour lesquelles on n’a pas d’atout particulier, cette stratégie doit être construite autour de quatre impératifs et atouts :

  • valoriser notre marque, synonyme de qualité : à l’ère de la numérisation et du web, la croissance exponentielle des quantités d’informations disponibles pose sous un jour nouveau le problème de la sélection et de la pertinence de l’information pour les besoins spécifiques des consommateurs.
    Cette dimension s’ajoute à la définition traditionnelle de la « qualité éditoriale » (exactitude, rapidité), et prend le pas sur les valeurs plus quantitatives d’exhaustivité de la couverture.
    Permettre au client de naviguer dans la copie et de la trier de manière efficace en termes de temps passé, de coût et d’intérêt des résultats obtenus, constitue désormais un service dont la valorisation ira croissant à mesure que la fourniture d’informations brutes perdra de sa valeur marchande en raison de l’abondance des sources et de la facilité de réplication ;
  • mettre en avant la diversité des informations proposées : la mise en évidence des différentes visions, approches, évaluations de l’actualité peut offrir de nouveaux espaces de valorisation. Et la richesse des angles, des points de vue selon les géographies et les cultures autorise une production très différente de celles d’agences marquées par une culture nationale dominante.
    C’est ce qu’exprime le slogan de l’Agence en anglais et en espagnol (« A world of difference » ; « Marcando la diferencia ») ;
  • mettre à la disposition des clients une analyse permettant d’aller au-delà des faits bruts. La lecture proposée, la mise en perspective, la recherche de comparaisons historiques ou géographiques, les commentaires sollicités de spécialistes ou d’acteurs sont autant de valeur ajoutée au fait d’actualité. D’ores et déjà, l’analyse structure, oriente et facilite le travail éditorial ultérieur des clients.
  • accentuer la différenciation des produits : il faut rechercher l’élaboration de nouveaux agrégats d’information multimédia, une capillarité plus profonde et systématique, de nouveaux publics cibles aussi.
    Il ne s’agit pas, en termes de vision stratégique, de quitter le terrain d’action de l’Agence mais au contraire d’en tirer encore meilleur parti, en s’appuyant sur nos avantages compétitifs tout en se diversifiant de façon plus résolue.
    L’Agence doit poursuivre la valorisation de son « core business » (1.3.2) et se donner de nouvelles activités de diversification (1.3.3), y compris via la mise en œuvre de partenariats avec des tiers spécialisés ou d’autres agences, en particulier européennes, qui seront demain de puissants relais de croissance.

 

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1.3.2. La poursuite du développement du « core business »

Parce que l’Agence est active dans le monde entier, elle a des clients qui se trouvent à différents moments de l’évolution de leur modèle d’affaires : pendant que, dans la presse écrite américaine, les mauvaises nouvelles s’accumulent, l’Inde et la Chine créent des journaux, le Moyen-Orient multiplie les télévisions d’information en continu etc.

L’AFP peut donc jouer sur ces maturités différentes selon les marchés pour poursuivre son développement, toujours appuyée sur ses valeurs.

Parallèlement aux efforts de vente de texte, photo, vidéo, séparés, le déploiement du programme de transformation informatique « 4XML » permettra de lier, d’enrichir et de diversifier les contenus, d’innover par la création de produits et services destinés aux nouvelles plateformes, réseaux et supports, de donner plus de profondeur à la recherche, aux bases de données.

La démarche de l’AFP, en interne comme dans le cadre des partenariats à trouver, obéit à une logique résolument « rich media », consistant à intégrer, harmoniser, synchroniser les différents médias - texte, photo, vidéo, infographie - et à organiser l’interaction de ces objets numériques dans une production multimédia native.

Quelques axes apparaissent prioritaires.

  • a/ Miser toujours plus sur les régions en développement et thématiques porteuses
    Les efforts éditoriaux et commerciaux doivent porter prioritairement sur les régions et marchés les plus porteurs que sont, dans l’ordre, l’Europe, le Proche-Orient et l’Asie.
    La démarche implique des redéploiements de ressources, un enrichissement et une régionalisation de l’offre.
    La prise en compte des nouvelles thématiques les plus prisées par les lecteurs, spectateurs, auditeurs et internautes (environnement, nouvelles technologies, santé, vie pratique) doit être renforcée grâce à une meilleure allocation des ressources propres et par la mise en place de partenariats de contenus, à l’instar des partenariats déjà noués avec ParisModes, Relaxnews, CBS, Getty, etc.
  • b/ Des langues prioritaires
    Le dispositif francophone demeure la colonne vertébrale de l’AFP et permet de distinguer l’Agence de ses grands concurrents anglo-saxons, contribuant ainsi à sa singularité.
    Pour autant, cet élément de différentiation ne doit pas contraindre son développement et empêcher l’Agence de développer et valoriser en parallèle son caractère pluriculturel. Dans ce cadre, la montée en puissance de productions natives en anglais et en arabe notamment, doit se poursuivre.
    Au-delà, l’AFP devra rapidement poser les fondations d’un service en mandarin.
    Elle devra aussi rechercher des partenariats de traduction en vue de confectionner de nouveaux produits de niches : journal Internet en polonais ou en russe, traductions multiples de l’infographie animée sur les grands événements sportifs, voicing de la vidéo dans des langues locales d’usage répandu, par exemple.
  • c/ La vidéo
    Dernier-né de la famille des briques numériques de l’AFP, c’est aussi celui qui présente le plus fort potentiel de croissance. AFPTV, née à la fin des années 90 et développée à l’international en 2007, a depuis lors réalisé son plan d’affaires prévoyant une croissance de ses produits supérieure à 50% en 2 ans, avec des moyens limités. Elle disposait début 2009 d’une quarantaine de contributeurs à plein temps ou occasionnels de par le monde.
    L’apparente insatiabilité pour la vidéo de la télévision et du web offre des perspectives d’autant plus encourageantes que l’AFP bénéficie paradoxalement de son entrée tardive sur le marché, son retard ayant été compensé par le recours à des technologies nouvelles de production et de transmission à bas prix.
    En outre, le positionnement produit spécifique d’AFPTV la libère des contraintes coûteuses de la diffusion en temps réel. La production AFPTV, résolument différenciée, est en effet dominée par le format « magazine à valeur ajoutée ». Elle complète plutôt qu’elle ne concurrence les images d’actualité immédiate proposées depuis une quinzaine d’année par Reuters et APTV. Moins exhaustive et meilleur marché, elle présente un attrait grandissant pour le web aussi bien que pour les télévisions récemment créées ou pour celles qui sont à la recherche d’économies.
    Contrairement aux autres productions AFP, la vidéo s’est d’emblée développée sur un modèle coopératif incluant l’achat et l’agrégation de contenus, via la recherche de productions extérieures complémentaires. Des partenariats ont été noués avec CBS (pour la couverture nord-américaine), Getty (pour le « red carpet » notamment) ou Paris-Modes (défilés de mode). L’Agence entend poursuivre cette logique et même l’intensifier dans des domaines tels que le sport, l’économie ou la finance.
    Enfin, l’AFP s’organise, notamment à travers sa filiale Citizenside, pour prendre en compte des contenus vidéo, photo et texte émanant du public (« UGC ou User Generated Content »), moyennant la mise en place préalable de modes de vérification stricts.
    De même, elle encourage l’avènement de journalistes (reporters, photographes) susceptibles de produire de la vidéo avec des moyens légers.
  • d/ Le multimédia et l’infographie (en particulier animée)

    Le multimédia mobilise aujourd’hui une cinquantaine de journalistes chargés d’agréger des contenus selon la méthode du « copier-coller ». Ils sont répartis internationalement au sein de dix unités spécialisées disséminées dans les grands centres régionaux de l’Agence et à Paris.

    La production multimédia « native » autorisée par le déploiement du programme de modernisation informatique dit « 4XML » permettra à ces unités de se consacrer davantage au travail de hiérarchisation de l’information et à la confection de produits à valeur ajoutée. Les desks traditionnels (aujourd’hui mono médias : texte ou photo) intégreront graduellement le travail d’édition multimédia, grâce à un système informatique permettant de mobiliser des « métadonnées » homogènes entre les médias, et proposant des solutions d’assemblage intuitives aux éditeurs.

    Outre une évolution des outils, ces développements impliquent un ambitieux programme de formation, et la réorganisation spatiale des pôles d’édition sur de vastes plateaux favorisant le décloisonnement des services et encourageant la fertilisation croisée des métiers et des produits.

    Vidéo, multimédia, l’AFP peut devenir le numéro 1 français, voire européen, du journalisme visuel, de l’infographie animée, de l’infographie en 3D et de la visualisation de données : le marché du « digital story-telling » n’est pas encore organisé, il faut y investir, de façon organique, et/ou par acquisitions.

     

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    1.3.3. La diversification via les activités « satellites »

    Le cœur de métier des agences de presse ne peut dégager qu’une rentabilité limitée. Les raisons en ont d’ores et déjà été données : coûts de réseau élevés, accrus par l’obligation des missions d’intérêt général, forte concurrence sur les prix entre agences de presse, illusion de la gratuité de l’information sur le web, difficultés économiques quasi-universelles des médias, traditionnels ou même nouveaux.

    La viabilité de l’Agence, le financement de ses métiers traditionnels et ses espoirs de développement résolu passent donc nécessairement par la diversification. L’étude des politiques menées par nombre de nos concurrents (les agences anglaise PA, allemande DPA, autrichienne APA, australienne AAP, etc.) démontre au demeurant le réalisme de cette affirmation.

    Dans tous les cas cités, la rentabilité consolidée des groupes provient de leurs filiales de diversification, et non du cœur de métier qui les a pourtant rendues possibles et qui aujourd’hui leur doit sa survie.

    Des activités « satellites » sont possibles et rentables si elles s’appuient sur, et si elles développent, l’un ou l’autre des atouts suivants de l’agence de presse traditionnelle :

    • valorisation du réseau (réseau humain de collecte, réseau humain de commercialisation, réseau technique de collecte et de distribution, réseau logistique de nos implantations physiques) ;
    • mise en oeuvre plus complète et plus novatrice de la logique de syndication au service des clients ;
    • recherche d’économies d’échelle et de partages de coûts avec d’autres agences, notamment au niveau européen ;
    • maîtrise élargie de la chaîne de valeur, passage des « produits de contenus » aux « services à forte valeur ajoutée », incorporant autant de technicité que de contenus mais disponibles « clé en main », et permettant idéalement des offres personnalisées ;
    • diversification des débouchés et des clientèles, au-delà de la cible des médias traditionnels et des médias tout court ;
    • prise en compte des glissements du « B to B » traditionnel vers le « B to B to C », voire le « B to C », qu’engendre immanquablement l’internet.

    Toutes ces actions reposent au surplus sur le professionnalisme des équipes de l’AFP et la force de sa marque.

    L’obtention de nouveaux moyens de financement ouvre la perspective d’un plan stratégique de développement et de diversification plus ambitieux sur quelques grands axes.

    • a/ Les services aux médias
      La logique de fourniture de services à forte valeur ajoutée et de syndication de moyens conduira à proposer, souvent à travers des filiales créées à cette fin, de nouveaux produits « technico-rédactionnels ».
      On peut citer à titre d’exemples :
      • dossiers multimédia (production favorisée par le nouveau système informatique) :
        • dossiers week-end ;
        • dossiers événementiels ;
        • dossiers documentaires ;
      • produits de mise en valeur de l’information :
        • diaporamas sonores ;
        • sms, mms ;
        • audios « text to voice » ;
        • quizz sur l’actualité, à l’instar de ce qui a été développé par notre filiale américaine Newzwag ;
      • pages éditées, prêtes à imprimer, pour la presse écrite :
        • sujets magazines (« pages froides ») ;
        • sujets événementiels (sport notamment) ;
      • animation rédactionnelle pour compte de tiers, à l’instar de ce que fait pour des portails allemands notre filiale SID ;
      • mise à disposition des médias de la plateforme d’accueil de contenus d’amateurs, Citizenside.
    • b/ Les services aux entreprises
      L’idée est ici de tirer parti des productions existantes, du réseau de journalistes, photographes et vidéastes déjà en place, et de notre réseau technique de collecte et de diffusion, pour développer, là aussi par le biais d’une ou de filiales, de nouvelles activités à coûts d’infrastructure constants. Citons par exemple :
      • commandes de reportages photo et vidéo ;
      • collecte et diffusion de communiqués de presse ;
      • collecte et diffusion à travers le monde de documents de communication d’entreprises (photo et vidéo) ;
      • sélection / indexation / vente d’archives photos AFP (11 millions environ aujourd’hui) dans le domaine de l’illustration.
    • c/ Troisième axe : du « B to B » vers le « B-to-B-to-C » ?
      Le problème principal des éditeurs aujourd’hui est celui de la disproportion entre les revenus perdus avec chaque disparition de lecteur « traditionnel » et ceux gagnés pour chaque nouveau lecteur sur l’Internet : le rapport est de 15 à 1.
      Tout ce qui pourra faire baisser le coût de la conquête, ou rendre l’expérience du lecteur en ligne plus riche, viendra renforcer le modèle d’affaires des éditeurs en ligne : c’est aussi le rôle de l’Agence que d’accompagner par ses initiatives cette mutation et pour cela, d’apprendre les règles du jeu des médias numériques.
      Explorer la coopération avec des éditeurs pour opérer ensemble des portails financés par la publicité
      L’Agence peut poursuivre l’apprentissage du « B to C » tel qu’expérimenté au Japon et en Corée, en évitant toute concurrence dans ce domaine avec la clientèle française, à charge pour les clients français de ne pas concurrencer l’AFP par la revente de ses contenus.
      Il faut en particulier se mettre en mesure de proposer sur Internet un mode de vente en « partage de revenus », s’inspirant des expériences en cours (notamment celle menée avec Google).
      Accompagner l’essor des nouveaux supports
      On peut citer ici plusieurs tendances et possibilités de marchés :
      • « News in motion » : les dépêches sont littéralement faites pour les portables (téléphones, ordinateurs, etc..), pour la mobilité, elles sont instantanées, numériques et de format adapté…
      • « Fils d’alerte » pour dirigeants, notamment le week-end, livré sur iPhones, Blackberry
      • Ne pas rater l’éventuel essor de l’e-book, l’e-paper
      • Continuer à développer les écrans publics dans les villes, transports, taxis, postes, kiosques de presse, lieux publics et de passage

      Développer et/ou acquérir des bases de données multimédia thématiques (sciences, sports, droits, finances, environnement…) qui viendraient enrichir les travaux des journalistes en interne et seraient valorisables auprès des communautés professionnelles (grands secteurs « verticaux »).

     

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    2. l’AFP DOIT DISPOSER DES MOYENS FINANCIERS DE SES AMBITIONS

    Les résultats obtenus depuis trois ans, avec trois résultat nets positifs après plusieurs années de pertes et la reconstitution d’une trésorerie convenable, ont permis à l’AFP de s’assurer d’un socle sur lequel il est possible de bâtir en quelques années une « nouvelle agence mondiale » fondée sur un nouveau modèle économique. Mais si ce socle est nécessaire, il n’est pas pour autant suffisant compte tenu des besoins financiers de l’Agence.

    Si le développement du « core business » peut et doit sans doute rester principalement affaire de croissance organique, conditionnée par la mise en œuvre d’outils rédactionnels nouveaux permettant de généraliser au sein de l’Agence la production de documents multimédia (le projet 4XML), cette approche « organique » n’est en revanche pas suffisante, s’agissant des projets de diversification (qui sont assez largement portés par la cellule de recherche et développement dite « Medialab »).

    La diversification peut être portée par des « start up » filiales de l’AFP, dans lesquelles elle détiendrait une participation majoritaire, voire de 100% (c’est le cas de Newzwag ou d’AFP Corporate, actuellement). Auquel cas, il faudra prévoir de financer des pertes d’exploitation initiales. Dans d’autres cas, il faudra prévoir de procéder à des acquisitions de sociétés de contenus et/ou de sociétés technologiques, comme nous l’avons fait en acquérant une part délibérément minoritaire de Citizenside. Pareilles acquisitions pourraient concerner les secteurs des « data » sportives ou les communiqués de presse. D’autres solutions encore peuvent être envisagées.

    Ce qui est certain à ce stade, c’est que rien d’important ne peut se faire en termes de développement et de diversification, sans des moyens financiers conséquents qui, en tout état de cause, ne sont pas aujourd’hui à la portée de l’Agence. Or, on l’a dit, sans le financement de la diversification, c’est tout l’effort financier vers le « core business » qui est en réalité mis en danger car, à terme, le cœur de métier de l’AFP ne tiendra que grâce à ses activités périphériques.

    Au titre des besoins financiers, il convient de distinguer les apports nécessaires à la restructuration du bilan, de ceux qui financeraient la stratégie de développement à moyen et long termes de l’Agence.

     

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    2.1 Financement de la restructuration du bilan

    Pour permettre à l’Agence de chercher et d’obtenir des financements sur les marchés sans l’aide de l’Etat, il est nécessaire de restructurer son bilan afin de l’aligner sur les standards de marché.

    Bien évidemment, cette réflexion sur le bilan de l’Agence va de pair avec la réflexion sur son statut mais ces deux réflexions peuvent être appréhendées indépendamment l’une de l’autre car, quel que soit son statut, l’Agence ne sera en mesure d’obtenir des financements extérieurs à des conditions de marché que si son bilan est profondément restructuré.

    A cet égard, l’analyse du bilan et des comptes 2007 appelle les commentaires suivants.

    La présentation du bilan et des flux (exploitation et trésorerie) donnée à des investisseurs quelle que soit leur nature (publics ou privés) doit être conforme aux bonnes pratiques en termes de :

    • normes comptables (comptes sociaux versus comptes consolidés) : l’adoption par l’Agence des normes « IFRS » pour la présentation de ses comptes consolidés depuis deux ans correspond en principe à cette attente ;
    • valeur des actifs : certains actifs pourraient éventuellement faire l’objet d’une réévaluation (« fair value ») :
      • l’immeuble (en tenant compte toutefois de la forte cyclicité des cours de l’immobilier qui rendrait très imprudente toute majoration inconsidérée, comme le montre la crise actuelle) ;
      • les logiciels ;
      • les autres actifs incorporels tels que les marques, qui semblent faiblement valorisées (mais il est vrai qu’il s’agit de marques associées à un modèle « Business to Business » généralement moins valorisées que les marques « Business to Consumer »).
    • nature des passifs :
      • les engagements sociaux : il s’agit pour l’essentiel de provisions pour indemnités de fin de carrière et non pas d’une dette sociale au titre d’un régime de retraites particulier. Les personnels de l’Agence bénéficient de ce point de vue d’un régime de droit commun ;
      • les emprunts et dettes financières : l’emprunt bancaire (souscrit auprès de DEXIA) a servi à refinancer le remboursement du prêt participatif de l’Etat. Sur ce point, comme d’ailleurs pour ce qui est du contrat de « lease-back » sur l’immeuble du siège, l’essentiel de la dette contractée doit s’analyser comme un refinancement des passifs d’exploitation antérieurs. Ce constat conduit à souligner à nouveau la nécessité de restructurer le bilan en purgeant les reports à nouveau déficitaires et en renforçant les fonds propres de l’Agence.
      • capitaux propres : ils sont insuffisants, par rapport à des sociétés comparables, tant au regard du ratio dettes sur fonds propres que du ratio capitaux propres sur chiffre d’affaires.
        Le ratio dettes sur capitaux propres devrait plutôt se situer entre 70% et 80% pour respecter les normes prudentielles (capacité de refinancement) de ce type d’activité.
        De la même façon, le ratio capitaux propres sur chiffre d’affaires devrait se situer à 1 pour 8, l’Agence étant une activité de service mobilisant du capital pour ses infrastructures et ses systèmes de production.
        Ces deux approches conduisent à un montant de fonds propres idéal, toutes choses égales par ailleurs, de l’ordre de 35 millions d’euros.

     

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    2.2 Financement de la stratégie de développement

    Besoins de financement liés aux investissements : il est prévu de financer le projet 4XML à hauteur de 20 millions d’euros par un apport de l’Etat (le sort des dotations prévues au COM reste d’ailleurs à préciser), et à hauteur de 10 millions d’euros par autofinancement, compte tenu des perspectives de résultat de l’Agence.

    Besoins de financement liés à la stratégie de croissance externe : l’objectif pourrait être de faire passer la part des recettes provenant de l’Etat (aujourd’hui de l’ordre de 40 %) à 30 % en 2013. Pour ce faire, un surplus de recettes de l’ordre de 90 millions d’euros, obtenues par croissance externe, est à rechercher à l’horizon 2013.

    L’ordre de grandeur du coût d’une acquisition dans les domaines d’activité de l’Agence représente en moyenne une année de chiffre d’affaires. Mais, dans la mesure où ces acquisitions se feraient de façon étalée d’ici 2013 et généreraient elles-mêmes leur propre croissance, le montant des investissements nécessaires via des acquisitions pour réaliser un chiffre d’affaires additionnel de 90 millions d’euros à l’horizon 2013 est estimé à 65 millions d’euros.

    Il en résulte, en première approche, un besoin de financement pour l’Agence de l’ordre de 65 Millions d’euros, lui permettant de « muter » en construisant, en partie par croissance externe, un nouveau portefeuille d’activités sur des marchés porteurs.

    Ces 65 millions d’euros pourraient être financés à concurrence de :

    • 20 à 25 millions d’euros par de la dette ;
    • 40 à 45 millions d’euros par des apports en fonds propres (couvrant bien entendu le point évoqué ci-dessus sur la structure du bilan).

    Ces montants doivent s’entendre hors les 20 millions d’euros finançant par ailleurs le projet « 4XML ».

    Les premières étapes d’une approche économique et financière pourraient consister à établir un plan stratégique à 3/5ans accompagné d’un nouveau plan d’affaires plus ambitieux correspondant à la vision stratégique proposée. Ce plan comprendra un « modèle », outil permettant aux investisseurs d’apprécier les trajectoires, de mesurer la sensibilité des flux de revenus et de trésorerie sous certaines hypothèses.

     

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    3. L’AFP DOIT DISPOSER DU CADRE JURIDIQUE A MEME DE PORTER SES AMBITIONS

    3.1. Rappel du COM 2009-2013

    « Le statut de 1957 a permis d’atteindre les objectifs fondamentaux assignés par le législateur à l’AFP puisque l’Agence, dont il a finalement assuré la pérennité, continue de remplir en toute indépendance sa mission d’information en France et dans le monde grâce à son réseau mondial de journalistes.

    Toutefois, un actionnaire stable apportera : un soutien solide, programmable, pérenne ; des moyens pour financer un plan de développement à long terme ; une vision partagée de l’avenir.

    Réformer le statut de l’AFP pour la doter d’un actionnariat ne peut se concevoir que dans le respect des principes suivants.

    La garantie de l’indépendance éditoriale

    Toute réforme du statut doit garantir le maintien en vigueur des obligations fondamentales figurant à l’article 2 du statut actuel de l’Agence : l’AFP a l’obligation d’être indépendante et objective ; elle doit, « dans toute la mesure de ses ressources développer son action », donner sans interruption une information exacte, impartiale et digne de confiance, elle doit assurer l’existence d’un réseau d’établissements.

    Il faudra trouver les solutions juridiques garantissant la pérennité de ces obligations - qui sont autant de droits et donc de libertés pour les journalistes de l’Agence - tout en dotant l’Agence d’un actionnariat stable.

    La structure de l’actionnariat

    En premier lieu, l’actionnaire de référence doit accepter le principe d’indépendance rappelé ci-dessus, parce qu’il aura compris que le seul véritable actif de l’Agence, construit patiemment depuis 50 ans, c’est précisément l’indépendance et le souci d’extrême qualité éditoriale qui guident toute l’action de sa rédaction. Un actionnaire public capable de financer des investissements à long terme qui ne seraient pas soumis à une obligation de forte rentabilité immédiate pourrait être une réponse adaptée.

    L’Agence devra conduire une mission de réflexion en vue de proposer les termes de la modernisation de son statut et de sa gouvernance, en étudiant notamment les avantages et les inconvénients d’une évolution vers un statut de société, qui pourrait, le cas échéant, permettre une participation des salariés au capital de l’entreprise.

    Deux principes doivent être conciliés :

    • d’une part, la protection, sous des formes à déterminer, de l’indépendance de la rédaction, gage de la crédibilité de l’Agence ;
    • d’autre part, une évolution du modèle économique de l’AFP, susceptible de permettre son adossement à un actionnariat stable et pérenne, seul à même de garantir à l’avenir le financement régulier de son développement. »

     

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    3.2. Le cadre juridique de l’Agence doit évoluer

    3.2.1. Le Statut de 1957 n’est plus adapté

    On l’a dit, le statut actuel de l’AFP a incontestablement permis à l’AFP d’asseoir son identité, sa réputation depuis plus de 50 ans. Il est aujourd’hui un élément central de l’indépendance de l’Agence. C’est pourquoi l’ensemble des personnels de l’AFP lui sont légitimement attachés.

    Pour autant, ce statut n’est plus adapté aux nécessités et aux défis du moment, au point de devenir un handicap.

    Il relève d’une logique de quasi monopole où les médias historiques abonnés s’imposaient en tant que fournisseurs d’information au grand public. Mais la donne a changé. Les nouveaux médias, les entreprises et les individus, ont acquis un poids considérable et bousculé le modèle traditionnel.

    Ne se rattachant à aucune catégorie connue de personnes morales (aux termes de l’article 1er de la loi du 10 janvier 1957, l’AFP est un « organisme autonome doté de la personnalité civile et dont le fonctionnement est assuré suivant les règles commerciales ») le statut de l’Agence, conçu pour garantir l’indépendance de sa rédaction est devenu un frein à son développement

    Ce statut prive l’Agence d’un intérêt social propre, sans pour autant lui conférer explicitement un objet d’intérêt général. Ses abonnés médias, majoritairement décisionnaires en vertu des règles de gouvernance, exigent de l’Agence qu’elle favorise la réalisation d’économies d’échelles à leur profit, de même que leur transition vers de nouveaux modèles d’affaires, sans considération de ses impératifs de développement.

    Par ailleurs, les missions d’intérêt général au service de tous qu’elle doit assurer en application des obligations fondamentales qui lui incombent ne sont pas toujours explicitement énoncées et ne sont jamais rémunérées per se. L’Agence navigue ainsi « entre deux eaux ». Elle supporte des sujétions qu’elle n’accepterait probablement pas si elle ne prenait en compte que son intérêt propre, sans pour autant bénéficier des compensations adéquates.

    Le manque de lisibilité du statut actuel de l’Agence doit également être relevé. D’origine législative, il donne à l’Agence une dimension « politique » qui s’accorde mal avec son indépendance par ailleurs proclamée et réelle. A l’étranger, ce statut est d’ailleurs perçu comme une « spécificité » française qui tend à rattacher l’AFP à la catégorie des agences gouvernementales plutôt qu’à celle des agences indépendantes à laquelle l’AFP n’a pourtant jamais cessé d’appartenir.

    Enfin et surtout, le statut de l’Agence lui interdit de recourir aux financements de marché pour réaliser des opérations de haut de bilan. Sans capitaux propres pérennes, l’Agence ne peut financer son développement. Chose de tout le monde, elle n’est la chose de personne.

     

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    3.2.2. Les relations avec l’Etat doivent être refondées

    Les relations entre l’AFP et l’Etat ont une double nature :

    • relation commerciale entre l’Agence et l’un des ses clients les plus importants ;
    • relation avec la puissance publique pour la mise en œuvre de missions et d’obligations d’intérêt général.

    Si la dimension commerciale de cette relation doit se poursuivre normalement et ne pose pas de difficulté particulière, la seconde mérite d’être clarifiée. Si cette clarification n’est pas menée volontairement par l’Etat et l’Agence, ils devront tôt ou tard s’y atteler sous la contrainte des concurrents de l’AFP.

    A l’heure actuelle en effet, les missions d’intérêt général de l’AFP et les sujétions qu’elles font peser sur l’Agence ne font l’objet d’aucun encadrement clair.

    Alors qu’elles trouvent toutes leur source dans la loi du 10 janvier 1957, ces missions et obligations ne font pas l’objet d’une définition précise ni d’une contractualisation avec l’Etat. Leur coût pour l’Agence n’est pas chiffré.

    Aucun suivi régulier de leur mise en œuvre n’est assuré. Aucun financement spécifique n’est prévu, les missions d’intérêt général de l’Agence étant aujourd’hui financées – partiellement au demeurant – par la voie des abonnements des services publics usagers.

    Cette situation n’est satisfaisante ni pour l’Agence ni pour l’Etat. Elle doit faire l’objet d’une remise en ordre, pour des raisons juridiques (notamment communautaires) mais aussi pour des raisons financières et de gestion. Il importe donc de définir clairement et de contractualiser les missions, de les délimiter, de les chiffrer et d’en fixer le financement propre.

    L’Agence se prépare dans ce cadre à mettre en place les procédures de suivi, de contrôle et d’évaluation nécessaires.

     

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    3.3 Axes de réflexion pour un nouveau cadre d’activité

    3.3.1. Les principes directeurs

    Le schéma d’évolution envisagé s’articule, à ce stade, autour des principaux éléments suivants :

    • la garantie de l’indépendance de l’Agence : toute réflexion sur le statut de l’AFP doit reposer sur la garantie du respect de l’indépendance rédactionnelle de l’Agence vis-à-vis de l’Etat, de ses futurs actionnaires, de ses abonnés et plus généralement de tous interlocuteurs politiques ou économiques quelle que soit la nature de leurs objectifs ;
    • la définition et la contractualisation des missions d’intérêt général dont l’AFP a la charge, et la mise en place d’un mode de financement de ces missions ;
    • l’adoption d’un statut juridique lisible lequel combiné aux mécanismes de protection de son indépendance et de définition de ses missions, lui permettra de rechercher les moyens de son développement.

     

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    3.3.2. La question de la forme juridique de l’AFP

    L’Agence s’est livrée à une revue très large des différents cadres possibles en droit français, tout en intégrant dans sa réflexion les exemples d’agences et de grands médias étrangers.

    D’emblée, certaines formes juridiques ont été écartées comme manifestement incompatibles avec les objectifs et missions assignés (formes sociales adaptées aux petites structures, notamment) et la réflexion s’est concentrée sur les trois formes juridiques qui sont apparues les plus pertinentes : l’établissement public, la coopérative et la société de droit commun.

    L’établissement public

    L’AFP pourrait être transformée en établissement public. Un tel retour en arrière (l’Agence a été établissement public à caractère administratif de la libération à 1947 puis établissement à caractère industriel et commercial jusqu’en 1957) présenterait l’avantage évident d’un arrimage fort à l’Etat et de la reconnaissance (« par nature ») de l’intérêt général s’attachant à l’objet de l’AFP. Ces avantages apparents ne doivent cependant pas masquer les différentes contraintes qui pèseraient dans un tel cas sur l’AFP.

    D’une part, en tant que démembrement de l’Etat, l’établissement public semble difficilement compatible avec l’objectif d’indépendance. Certes, des aménagements législatifs seraient possibles et l’on pourrait envisager un établissement public placé sous la protection du Parlement.

    Mais une telle solution, outre sa complexité, serait moins satisfaisante que la situation actuelle du point de vue au moins de la perception de l’AFP à l’étranger, où l’Agence ne peut se permettre d’apparaître comme un outil au service d’une politique nationale.

    Cette forme juridique contraindrait nécessairement l’AFP dans son développement en raison du principe de spécialité qui impose une lecture stricte, et donc une limite, de l’objet des établissements publics et de leur mode d’exercice.

    On ne voit pas enfin, en quoi cette forme juridique permettrait à l’Agence de lever les financements nécessaires à son développement alors qu’elle n’autoriserait pas de faire entrer un investisseur en capital (même public). L’argument tiré des conditions de financement sur le marché obligataire, ne peut guère prospérer non plus.

    Certes, en première analyse, le statut d’établissement public pourrait favoriser les conditions de financement de l’AFP, les agences de notation faisant en général un lien entre la notation financière des établissements publics de l’Etat et celle de l’Etat lui-même.

    Mais l’avantage risquerait surtout de se convertir en contrainte car, de plus en plus fréquemment, le statut d’établissement public est contesté par l’autorité communautaire lorsqu’il s’applique à des entreprises exerçant des activités industrielles et commerciales (notamment sur le terrain des aides d’Etat, du fait de la prétendue garantie de l’Etat sur les établissements publics et de ses conséquences sur la notation des établissements publics).

    Enfin, un tel établissement public constituerait probablement à lui seul une catégorie d’établissements publics au sens de l’article 34 de la Constitution. Son régime serait alors entièrement législatif. Et c’est l’objectif de souplesse qui ne serait pas atteint.

    Au total, le statut d’établissement public n’apparaît pas comme la solution adéquate.

    La forme coopérative

    La réflexion a également porté sur la forme coopérative, largement retenue par de nombreux médias à l’étranger. Ainsi, sous des formes diverses tenant aux spécificités de chaque législation nationale, c’est le statut adopté aux Etats-Unis par Associated Press, par APA en Autriche ou par ANSA en Italie.

    Le premier atout de la coopérative et le plus évident est d’associer entre eux les « utilisateurs » d’un service et ses producteurs, le tout selon le principe d’égalité entre « associés – coopérateurs » : un membre / une voix, les dérogations étant strictement entendues.

    La coopérative ouvre par ailleurs la possibilité d’adopter un capital variable ce qui autorise une plus grande souplesse dans l’entrée et la sortie des actionnaires (droit de retrait, clause d’exclusion), dans la limite du plancher du capital social fixé par la loi. Le cadre de la coopérative peut ainsi paraître particulièrement adapté à l’univers de la presse, en constante évolution.

    Ces avantages indéniables ne paraissent cependant pas suffisants pour préconiser ce statut pour l’AFP.

    Tout d’abord, la situation financière difficile des abonnés qui seraient associés coopérateurs sur un marché français déjà très étroit n’est pas propice à la mise en commun de moyens financiers suffisants pour assurer à l’AFP un déploiement continu, national et international.

    Ensuite, la poursuite d’intérêts spécifiques aux associés coopérateurs, dont les nouveaux modèles d’affaires peuvent faire concurrence à celui de l’Agence, ne favorise pas non plus les investissements consentis en sa faveur, pour sa projection vers l’avenir.

    C’était déjà le cas en 1957, lorsque la relation avec l’Etat a été organisée de sorte qu’il soit le principal contributeur en financements de l’Agence. Et le statut coopératif ne peut apporter aujourd’hui l’intérêt social propre ayant fait défaut à l’Agence et qui est une des principales faiblesses de son statut actuel.

    Le statut coopératif présente en outre une faible lisibilité en ce qu’il ne permet pas d’établir un lien direct entre droits en capital et pouvoir de décision dans les organes délibérants.

    Surtout, compte tenu de concentration croissante des groupes de médias, ce statut ne garantit pas l’indépendance de l’Agence vis-à-vis de ses abonnés.

    On rappellera à cet égard que dans une logique coopérative, la répartition des bénéfices au sein de la coopérative est effectuée proportionnellement aux commandes passées par les associés et non au nombre d’actions qu’ils détiennent. Partant, le financement des investissements s’opère en principe à due concurrence des achats faits par les associés. Dès lors qu’il fait peser le financement de l’AFP sur les coopérateurs, le statut de coopérative crée nécessairement un lien entre le poids économique de chaque coopérateur et son pouvoir, ce qui ne sera pas sans risquer de porter atteinte à l’indépendance de l’institution.

    La gouvernance de la coopérative pourrait se révéler difficile du fait notamment du poids des principaux « coopérateurs – clients » qui revendiqueraient naturellement un droit de regard sur la politique d’investissement (le pouvoir de décision étant corrélé au chiffre d’affaires généré) pour peser sur la stratégie et les axes de développement de la coopérative. Il s’ensuivrait une demande forte des principaux « coopérateurs – clients » d’accéder aux organes de direction de la coopérative.

    En outre, si le recours au marché pour le financement est possible en droit (notamment via l’émission de titres participatifs, de certificats coopératifs d’investissement ou de parts à intérêt prioritaire sans droit de vote), le statut de la coopérative ne le facilite pas.

    Enfin, on précisera que les coopératives ne peuvent, en principe, admettre les tiers non membres à bénéficier de leurs services ce qui pourra entraîner une certaine lourdeur dans la gestion au quotidien de l’accès aux données de l’AFP.

    Au total, le statut de coopérative n’apparaît pas adapté à la situation de l’AFP.

    La forme société

    Si le statut de société de droit commun, pour l’AFP apparaît le plus adapté, c’est avant tout parce qu’il se prête à son développement industriel en raison de sa lisibilité et de sa souplesse.

    Il est lisible, tant au plan national qu’international en ce qu’il constitue un cadre classique, au fonctionnement éprouvé, que les interlocuteurs de l’AFP maîtrisent et ont l’habitude de manier. Il dote l’Agence d’un intérêt social propre. Surtout, c’est un statut qui n’interdit rien.

    La société AFP pourra être de droit privé et appartenir au secteur public avec un capital détenu par l’Etat ou toute autre personne du secteur public. Il appartiendrait alors à la loi de prévoir que le capital ne pourra être transféré à des intérêts privés.

    La forme de société permet bien évidemment de faire coexister la poursuite d’activités commerciales et l’exécution de missions d’intérêt général rémunérées.

    Il est par ailleurs possible de mettre en place une action spécifique ou des catégories d’actions créées pour assurer la pérennité des moyens et missions de l’AFP tout en contribuant à son financement (par exemple, actions sans droit de vote ou avec droit de vote limité ; actions donnant à leur titulaire un droit de veto sur toute décision mettant en cause les principes fondamentaux de l’AFP ; actions donnant le droit de solliciter une deuxième délibération de l’organe décisionnel sur un certain nombre de sujets, etc.).

    A cela s’ajoute la circonstance que le statut de société de droit commun peut aisément accompagner de nouveaux besoins de financement de l’AFP : il est par exemple possible – dans les limites posées par la loi – d’ouvrir le capital à des tiers (du secteur public, comme la CDC par exemple, ou aux salariés) pour accroitre le financement de.

    S’agissant des salariés, on soulignera la possibilité de mise en place d’un plan d’épargne d’entreprise abondé par l’AFP et alimenté par l’épargne personnelle du salarié (outre les sommes éventuellement affectées au PEE au titre de l’intéressement et du supplément d’intéressement, de la participation et du supplément de participation ou les sommes provenant d’un compte épargne-temps ou d’un transfert d’un autre PEE).

    Pour l’ensemble de ces raisons, le statut de société de droit commun apparaît pour l’AFP le plus à même de servir son développement.

     

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    4. PREMIERES PROPOSITIONS D’EVOLUTION DU CADRE JURIDIQUE

    Conformément aux principes directeurs rappelés ci-dessus, le schéma d’évolution envisagé s’articule, à ce stade, autour des principaux éléments suivants :

    • la rédaction et l’adoption d’une charte de l’AFP incorporant les obligations fondamentales de l’article 2 du Statut et posant les principes fondamentaux de son fonctionnement ;
    • la définition précise et la contractualisation avec l’Etat des missions d’intérêt général dont l’AFP a la charge, et des modalités de financement de ces missions ; centrées sur le rayonnement de la France et du français, elles pourraient également concerner l’aide à la presse et aux médias.
    • la création d’une entité sui generis appelée « Fondation », successeur de l’actuel Conseil Supérieur, chargée de veiller au respect par l’AFP des obligations fondamentales et à la mise en œuvre de ses missions d’intérêt général, dotée pour cela de droits spécifiques, lui permettant de s’opposer à toute mesure des instances de décision de l’AFP mettant en cause la charte et les missions d’intérêt général ;
    • la transformation de l’AFP en société de droit commun à capitaux publics, à l’exception des actions détenues par les salariés et la fondation, et l’ouverture de ce capital à des investisseurs de long terme appartenant au secteur public.

    Il convient d’apporter quelques précisions sur les deux derniers aspects du schéma d’évolution proposé, les deux premiers ne présentant a priori pas de difficultés.

     

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    4.1 Une société nationale de droit commun

    Comme on l’a dit, le statut de société paraît le plus adapté pour répondre aux besoins de financement à l’Agence, tout en assurant son indépendance. Il est le seul susceptible de lui garantir un fonctionnement à la fois souple et lisible et de lui permettre de solliciter des investisseurs publics ou poursuivant des fins d’intérêt général et de long terme.

    4.1.1. Schéma de transformation

    Compte tenu de son statut particulier issu de la loi n°57-32 du 10 janvier 1957, la modification du statut de l’AFP et sa transformation en société anonyme ne pourrait s’opérer que par une loi. Au demeurant, seule la loi pourrait permettre d’asseoir sans risque le principe de continuité de la personne morale dans le cadre de la transformation de l’AFP en société.

    [Note en bas de page : A titre d’exemple, le recours à la loi permettra de préciser que la transformation en société anonyme de l’AFP ne remet pas en cause les autorisations de toute nature accordées à l’AFP ou les contrats de toute nature auxquels elle est partie.]

    Après sa transformation, l’AFP serait régie par le droit des sociétés, étant entendu qu’afin de s’adapter à l’activité et au fonctionnement de l’Agence, certaines dispositions de la loi devront déroger au droit commun des sociétés anonymes : détention du capital et restrictions sur les possibilités de transferts, obligations fondamentales intangibles, mécanismes garantissant leur respect. On peut envisager que, par dérogation de ce type, une certaine place soit faite dans les organes de décision à des personnalités qualifiées issues du monde de la presse.

    Sa gouvernance résulterait de l’application des règles de droit commun, sous les réserves mentionnées.

     

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    4.1.2 Répartition du capital

    En ce qui concerne la répartition du capital de l’Agence, il pourrait être décidé que les actions soient détenues par différentes catégories d’actionnaires : l’Etat et des investisseurs publics de long terme (entités appartenant au secteur public), les salariés pour une quote-part maximum définie par la loi, la fondation pour les besoins de son action spécifique.

    A condition de prévoir des contreparties, il devrait être possible d’envisager d’offrir des conditions préférentielles de souscription aux salariés, les mécanismes traditionnels de décote ou de délais de paiement trouvant leur contrepartie dans l’inaliénabilité temporaire des titres acquis ou souscrits. Les questions liées aux mécanismes de liquidité à mettre en place devront être analysées.

     

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    4.2 Les garanties de l’indépendance : le recours à une fondation

    Afin de garantir l’indépendance de la rédaction de l’Agence au travers d’un mécanisme symboliquement fort, l’on pourrait imaginer de faire reposer le contrôle du respect de cette indépendance par une instance impartiale et incontestable.

    En s’inspirant d’exemples étrangers, est envisagée à cet égard la création d’une « fondation » ad hoc (la « Fondation »), détenant des droits s’apparentant à ceux habituellement attachés aux « actions spécifiques » qui donnent à un actionnaire déterminé des prérogatives particulières en vue de la défense des intérêts dont il a la charge.

    Il s’agira en l’espèce de permettre à la Fondation de s’opposer à toute décision de la gouvernance de l’AFP contraire aux obligations fondamentales ou au bon accomplissement des missions qui lui sont confiées par la puissance publique, à toute modification de la composition du capital s’écartant des règles initialement posées.

    La Fondation serait administrée par un conseil réunissant un certain nombre de personnalités qualifiées, des hauts magistrats, voire des représentants de la rédaction de l’AFP.

    Il pourrait être opportun de faire de cette Fondation le véhicule recueillant les fonds destinés au financement des missions d’intérêt général. Ces fonds pourraient provenir soit directement de l’Etat soit, le cas échéant, d’autres sources de financement à déterminer (y compris des dons de particuliers et d’entreprises bénéficiant de mesure incitatives au plan fiscal). Si cette voie devait être retenue, la Fondation disposerait alors des pouvoirs de contrôle de l’utilisation des fonds en cause pour le financement des missions d’intérêt général.

    La Fondation jouerait ainsi plusieurs rôles et garantirait à la fois le respect des obligations fondamentales, le bon accomplissement des missions d’intérêt général, l’utilisation des fonds défiscalisés recueillis auprès des particuliers et des entreprises conformément à ces missions, et enfin le maintien de la composition du capital dans les limites initialement fixées.

     

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    CONCLUSION

    Informer, c’est donner. Donner des faits pour donner du savoir, donner des clés pour donner à mieux voir. Donner est d’ailleurs l’un des mots les plus employés à l’AFP : « nous avons donné à 7h50 (aux abonnés, donc aux lecteurs) l’information selon laquelle untel avait déclaré… ».

    Et donner pourrait s’accorder assez bien à l’âge de l’internet et à l’économie de la gratuité dont on voit depuis quelques années s’affirmer les contours…s’il ne fallait pas aussi, évidemment, vendre ou valoriser…et livrer.

    Pour continuer à livrer à ses clients beaucoup d’informations, il faut que l’Agence puisse se projeter dans la modernité : au-delà du renouvellement profond de son outil informatique, dont on comprend assez, 15 ans après son déploiement, toute l’urgence, il y a le besoin de développer de nouveaux produits, de nouveaux vecteurs de mise en relation, à travers nos clients, avec les publics du monde.

    Seuls des actionnaires motivés pourront apporter, avec leurs financements, toute l’attention, le dialogue permanent, la stimulation aussi, qui permettront à l’Agence de conquérir toute sa place dans un paysage en plein bouleversement.

    Les personnels de l’AFP, formidablement attachés à leur entreprise, passionnés, issus de plus de 80 nationalités, partagent la même religion du fait.

    Ils méritent - et leur Mission également, si intimement liée aux enjeux les plus démocratiques - d’être appuyés, ils méritent un avenir mieux assuré.


     

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    Historique du document :

    • le 22 octobre 2008 : lors d’une réunion du Conseil d’administration de l’AFP, l’Etat demande au PDG Pierre Louette de faire des "propositions en vue d’une modernisation du statut de l’Agence" pour voir "dans quelle mesure il est possible de doter l’agence d’un actionnariat stable". En même temps, l’Etat annonce qu’un nouveau Contrat d’objectifs et de moyens (COM) régissant les abonnements de l’Etat aux services de l’AFP et des aides pour un plan de modernisation technique entrera en vigueur début 2009.
    • le 12 décembre 2008 : lors d’une deuxième réunion du CA, M. Louette est réélu pour un nouveau mandat de trois ans à la tête de l’Agence. Les pouvoirs publics remettent au Pdg une lettre de mission, lui enjoignant de réfléchir à une modernisation du statut et de la gouvernance de l’Agence pour le 31 mars 2009.
    • le 31 mars 2009 : M. Louette annonce qu’il a remis son rapport aux ministères de la Culture, du Budget et de l’économie. Il affirme qu’il ne peut pas le livrer au Comité d’entreprise pour des raisons de confidentialité.
    • le 13 mai 2009 : soit plus de six semaines après avoir livré son rapport au gouvernement, M. Louette fournit enfin son rapport au personnel de l’Agence par le biais de leurs représentants syndicaux. Ces derniers, estimant que l’avenir de l’entreprise était en jeu, avaient entretemps lancé un "droit d’alerte" du Comité d’entreprise afin d’avoir accès aux faits.
    • le 27 mai 2009 : le texte intégral du Rapport Louette est rendu public pour la première fois par le site d’informations en ligne Bakchich (disparu depuis). "AFP, un rapport un peu à Louette", article de Simon Piel.
    • janvier 2010 : le document est publié sur le site "SOS-AFP"

    NB : Le rapport Louette, tel que publié sur le site intranet de l’AFP ne porte ni signature ni en-tête de l’AFP. En adaptant ce document pour notre site nous avons cherché à conserver, autant que possible, sa présentation d’origine.

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